Longueur |
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130 m |
Largeur |
nef |
16,5 m |
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transept |
13 m |
Hauteur |
voûtes |
35 m |
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bas-côtés |
14,5 m |
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clocher roman (sud) |
103 m |
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clocher Jehan de Beauce (nord) |
112 m |
La cathédrale se veut ouverte sur l'extérieur. Les trois portails, c'est-à-dire les neuf portes, constituent une invitation supplémentaire à y pénétrer, tant pour les fidèles que pour les visiteurs. Entrons par le Portail royal du 12ème siècle, le plus célèbre mais aussi le plus lisible par son exposition et sa disposition.
Les diverses parties de l'édifice ont chacune leur raison d'être, fonctionnelle ou symbolique. Les innovations architecturales font de Chartres un modèle de l'architecture gothique classique.
Pour bien la comprendre, il faut savoir que la cathédrale – église de l'évêque – était pour le chrétien du Moyen Age, à la fois la maison de Dieu et celle des hommes. D'où sa division en deux parties essentielles : le chœur où l'on célébrait le culte religieux et la nef et ses annexes où s'assemblaient les fidèles. L'édifice, à la différence d'aujourd'hui, était dépourvu de sièges et le dallage des bas-côtés était légèrement en pente pour l'écoulement des eaux du nettoyage indispensable après que les pèlerins avaient dîné et dormi dans la cathédrale. La pente se voit encore en pénétrant dans la cathédrale par le Portail royal. La cathédrale était aussi le centre d'une vie sociale active et multiforme : lieu de réunion, lieu de fêtes, lieu d'asile. Elle a la forme d'une croix, dont l'extrémité – le chevet – est orientée vers l'est parce que c'est de là que provient la lumière.
Mesurant plus de 16 mètres entre piliers la nef dépasse en largeur celle de toutes les autres cathédrales françaises (Notre-Dame de Paris a 12 mètres et Notre-Dame d’Amiens a 14 mètres), elle est cependant à simples côtés. Dans le plus pur style ogival du 13ème siècle, dit « lancéolé », elle n’a pas de tribune mais un triforium aveugle.
Rappelons les caractéristiques du style gothique lancéolé qui marque la période des grands chefs-d’œuvre (Chartres, Reims, Amiens).
Le style gothique lancéolé commence vers 1180 et se termine vers 1250.
La nef centrale de forme rectangulaire, longue de 59 mètres et large de 16 mètres est flanquée de deux bas-côtés.
Les colonnes intérieures sont alternativement cylindriques et octogonales.
Elle est coupée perpendiculairement par le transept qui mesure 64 mètres ; chacun des bras du transept particulièrement développé, s'ouvre sur l'extérieur par un portail.
C'est dans le transept que se formaient les grandes processions et les cortèges des jours de fête.
Au-delà du transept, on arrive dans un espace semi-circulaire, l'abside. Au centre de celle-ci, se trouve le chœur : à l'origine celui-ci était séparé de la nef par un jubé, aujourd'hui disparu. Cette haute cloison de pierres rappelait que l'accès au chœur, endroit le plus sacré de l'édifice, était réservé aux seuls ecclésiastiques qui y célébraient et chantaient les offices. Là, était installé l'autel principal où le prêtre disait la messe pour les fidèles rassemblés dans la nef et les bas-côtés.
Tout autour du chœur, une galerie en demi-cercle, le déambulatoire permettait la circulation des fidèles lors des processions et lorsqu'ils allaient prier tel saint ou vénérer ses reliques dans les chapelles rayonnantes. La relique la plus insigne était le Voile de la Vierge, offert par Charles le Chauve et placé dans une châsse au 10ème siècle.
Le maître de Chartres innova prudemment. Dans l'élévation, le triforium a remplacé les tribunes. Les fenêtres hautes chassent le mur, cédant la place aux vitraux. La cathédrale de Chartres devint le premier édifice de très grande dimension dont il fut décidé que tout le système de structure assurant sa stabilité reposerait sur l'emploi d'arcs boutants. De massives culées taillées en ressaut, canalisent les poussées de la voûte. De tout son poids, celle-ci peut alors s'élever à 37 m 50 au-dessus de la plus large des nefs de cathédrale gothique.
Cet édifice de pierre, dont tous les éléments d'architecture servent à conduire les forces vers le sol, nous attire irrésistiblement vers le haut, là où s'épanouissent dans la légèreté de la voûte, les piliers et les colonnes. Rien dans cet ensemble n'est gratuit. Toutes les lignes sont nécessité de construction. La décoration, elle-même, très sobre, révèle et souligne l'architecture. Nécessité qui est beauté.
Il faut parcourir lentement la nef ou l'un des bas-côtés pour en apprécier la santé robuste, l'immensité du vaisseau, l'élan puissant des piliers de la nef solidement amarrés au dallage, le rythme cadencé des piles tantôt cylindriques, tantôt octogonales, le mouvement ascensionnel des quatre gerbes de colonnes à la croisée du transept, l'admirable harmonie des proportions.
Dès les premiers pas dans la nef, on est saisi par l’éclairage étrange du vaisseau. Les vitraux diffusent en effet une lumière chaudement colorée qui accuse les saillies et les creux de l’architecture et plaque de larges touches aux riches couleurs sur les murs et le pavage.
La Chapelle Vendôme, datant du 15ème siècle, est pourvue d’un vitrail intéressant.
Dès le haut Moyen Age, les fenêtres des églises sont ornées de vitraux en couleur.
Il semble qu’il ne subsiste rien des verrières de cette époque.
Dans l’art gothique, les maîtres verriers jouent un rôle essentiel dans l’achèvement des églises et créent les merveilleux ruissellements de lumière chatoyante sans lesquels le sanctuaire demeurait interne et froid.
Le vitrail n’a pas seulement un rôle décoratif : il doit aussi instruire les fidèles. C’est un exposé imagé du catéchisme, de l’histoire sainte ou de la vie des saints.
Prolongeant le jubé, une clôture de pierre, toujours en place, fut édifiée et décorée aux 16ème et 17ème siècles.
Commencée en 1514 par Jean de Beauce, la clôture du chœur fut terminée au 18ème siècle. Cet admirable travail comprend 41 groupes sculptés illustrant la vie du Christ et celle de la Vierge. Des médaillons évoquent l’histoire sainte, l’histoire locale, la mythologie. Le contraste de cette statuaire renaissance avec celle des portails gothiques est saisissant. Dans cette église de pèlerinage, le chœur et le transept doivent se prêter à l’ample déroulement des grandes cérémonies. Ils ont donc plus d’importance que la nef ! L’ensemble du chœur à double déambulatoire et du transept mesure 64 m de porte à porte.
Les grandes orgues se trouvent dans un buffet datant des 15ème et 16ème siècles. Elles furent restaurées en 1971 et sont devenues un bel instrument néoclassique moderne.
Situé dans la Chapelle Saint-Piat datant du 14ème siècle, le trésor de la cathédrale possède notamment la célèbre relique dite « Voile de la Vierge » offerte en 876 par Charles le Chauve et des sculptures du jubé du 13ème siècle, détruit en 1763.
Derrière le nom de la Dame de Chartres, il y a trois représentations principales dans la cathédrale.
1. Notre-Dame de la Belle Verrière. Elle apparaît sur un vitrail qui sera expliqué ci-dessous.
2. Datant d’environ 1510, Notre-Dame du Pilier, cette Vierge est très vénérée est une statue en bois, taillée dans du poirier devenu noir avec le temps et l’oxydation, ce qui lui vaut le nom usurpé de Vierge Noire. Elle fut peinte à l’origine. Celle que l’on peut voir dans la chapelle n’est qu’une copie puisque l’originale fut brûlée à la Révolution.
3. Notre-Dame de Sous Terre, qui comme son nom l’indique est visible dans la crypte. C‘est la seule authentique Vierge Noire de la Cathédrale, c’est la Virgo Pariturae, la Vierge qui doit enfanter. Celle-ci est une copie de l’originale, réalisée en 1976. Le sculpteur s’est inspiré d’images anciennes représentant la statue qui fut brûlée à la Révolution française. C’est la fille d’Anne, la fille d’Ana la Celte, bien connue de nos amis bretons, la fille de la Terre, la grand-mère de toute vie, celle que les druides appelaient Danaan, archétype de la féminité féconde et sage. C’est elle qui doit donner la Vie ne faisant mourir la graine en son sein afin qu’elle repousse. C’est probablement pour cela que les anciens, essentiellement agriculteurs en cette région, pratiquaient son culte. Il est dit qu’ils l’avaient enfermée en une grotte profonde dessous terre.
Ces trois vierges sont des rappels multiples de la source de la vie au sens large. La vraie vie, celle venue d’une inconnue du monde mais qui portait l’espoir d’un monde nouveau. C’est aussi le rappel de cette graine qui poussa dans le noir de la terre pour faire jaillir la vie d’une nouvelle saison. L‘utilisation répétée du mot « source » n’est pas fortuite puisque les sources sourdent également de la terre. Le retour aux sources est un voyage qui nous tente tous.
Après l’incendie de la Basilique carolingienne en 1020, l’évêque Fulbert fit reconstruire un nouvel édifice, avec le souci de donner aux pèlerins un espace important où ils pourraient effectuer leurs dévotions : une église basse, église galerie conçue pour les processions de pèlerinage, d’une longueur exceptionnelle de 220 mètres environ. La crypte d’origine, située sous le chœur de la cathédrale actuelle, est seule préservée. Elle accueille les pèlerins venus rendre un culte à « Notre-Dame de sous terre ».
Elle présente des voûtes d’arêtes romanes. Sa forme est curieuse : deux longues galeries réunies par un déambulatoire passent sous le chœur et les nefs et desservent 7 chapelles rayonnantes dont 3 seulement sont romanes. Les autres ont été ajoutées par le maître d’œuvre de la cathédrale gothique pour établir les fondations du chœur et l’abside du vaste édifice prévu.
Faite de deux nefs parallèles de six mètres de large, la crypte, de pur style roman. C’est la plus importante et la plus vaste qui existe en France. Elle est bordée de 14 chapelles disposées régulièrement.
La fameuse grotte celtique y fut murée en 1650. A cette époque fut aménagée la chapelle dite de « Notre-Dame sous Terre ». A proximité de celle-ci se voit le puits des « Saints Forts », souvenir le plus lointain qui remonte à l’époque gallo-romaine !
Profond de 33 mètres, son nom lui vient de ce que des martyrs chartrains y auraient été précipités.
Dès les premiers siècles, l’eau de la source miraculeuse fut captée et c’est là sans doute l’origine de la fortune extraordinaire de Chartres et de son sanctuaire.
A côté du puits, des restes de murs gallo-romains sont encore visibles.
Le Caveau de saint Lubin, vestige de l’église carolingienne, abritait au Moyen Age les reliques et le trésor en cas de danger.
L'espace de la cathédrale a donc été conçu pour rendre possible toutes ces dévotions. Aujourd'hui encore des pèlerinages importants ont lieu chaque année.
On y a accès, à l’extérieur de la cathédrale, par la porte au bas du portail nord.
Pour la visite, il faut s’adresser à la Maison des Clercs, 18 Cloître Notre-Dame.
Examinons à présent le système de voûte de pierre qui caractérise les parties hautes de la nef.
L'emploi de la voûte de pierre répond à plusieurs préoccupations : remplacer la voûte en bois vulnérable à l'incendie (ce fut le cas en 1194) et utiliser un matériau qui convienne bien à la majesté de l'édifice. La pierre utilisée pour la construction vient des carrières de Berchères, près de Chartres, mais celle utilisée pour la statuaire est une pierre plus tendre, un liais, en provenance de la vallée de l'Oise.
C'est par des procédés architecturaux, déjà existants, mais renouvelés (arc brisé, voûte d'ogives, arc-boutant), reposant sur une nouvelle logique (« Dieu est lumière » - Suger), que les architectes du gothique ont obtenu une élévation plus audacieuse et des ouvertures plus larges.
A Chartres, l'architecte a fait preuve d'une grande originalité en réalisant les deux innovations suivantes :
L'arc-boutant que l'on a vu à l'extérieur du bâtiment devient un élément essentiel de la structure du bâtiment : il enjambe la toiture du bas-côté pour transmettre la poussée de la voûte centrale qui atteint 37 mètres.
Chartres se caractérise par l'équilibre remarquable de ses différentes parties et son extrême simplicité.
La charpente d'origine, dite « la forêt », qui était remarquable, a été détruite par l'incendie accidentel de 1836, ainsi que la couverture en plomb offerte par Blanche de Castille sous la minorité de Saint Louis.
Le samedi 4 juin 1836, en fin d'après-midi, des ouvriers plombiers travaillant à la couverture des combles, dans la cathédrale de Chartres, provoquent un incendie. La magnifique charpente en châtaignier, recouverte de plomb, s'embrase et c'est un patrimoine de huit siècles qui s'envole en fumée. Un vaste élan de solidarité entraîne vers la cathédrale les habitants des quartiers voisins, puis les pompiers chartrains, aidés bientôt par ceux des communes alentour.
Les pompiers luttent toute la nuit. Les flammes gagnent les habitations voisines de la cathédrale mais le matin, vers 9 heures, le feu est quasiment maîtrisé. Les parties en pierre - voûte, clochers, parois et sculptures - n'ont heureusement pas souffert.
En revanche, il convient de refaire intégralement la toiture. C'est l'ingénieur Emile Martin qui est choisi pour conduire les opérations. Directeur des forges de Fourchambault, constructeur du pont de Langon, en 1832, il s'est impliqué dans plusieurs polémiques de technique architecturale. Avec lui, le parti est pris d'une réfection en fonte et en fer des combles détruits, projet qui s'inspire de plusieurs modèles européens: ceux de la Southwark Cathedral de Londres (1822), ou de la cathédrale de Mayence (1827), et même de « Saint-Pierre de Rome, dont la coupole fut ceinturée de 50 tonnes de fer, ou Sainte-Geneviève dont les linteaux avaient nécessité l'emploi d'un savant système de chaînage en fer forgé. »
Pour le chantier de la cathédrale de Chartres, Martin fait appel à un entrepreneur de serrurerie, Théophile Mignon, dont les projets sont préférés à ceux d'autres serruriers. Les archives de la direction du Patrimoine possèdent plusieurs plans préparatoires finalement refusés. Il est bon de rappeler ici que la serrurerie, qui désigne plus couramment aujourd'hui le métier et l'art de fabriquer serrures, verrous et clefs, définit également la confection de pièces en fer de toute sorte et de celles, en particulier, qui entrent dans la construction civile, industrielle ou militaire.
En 1828-1829, Mignon a déjà refait les combles de la chapelle du Palais-Royal, avec Pierre Fontaine. Cette expérience lui assure la parfaite maîtrise de l'ouvrage chartrain, qui suscite une série de plans d'Amable Tronquoy, pour le Portefeuille industriel. Tronquoy, qui a été l'élève de M. Le Blanc, l'un des chefs de file de la nouvelle école de dessin technique depuis les années 1820, est un excellent dessinateur. Il est l'auteur d'un remarquable traité sur ces questions de dessin technique, publié en 1861 et qui ne connut pas moins de sept éditions jusqu'en 1884.
Traduisant un haut souci de précision, les dessins de Tronquoy relatifs aux combles de la cathédrale de Chartres sont accompagnés de nombreuses lettres de renvoi à une légende circonstanciée. Ils évoquent les structures métalliques des fermes de remplacement, c'est-à-dire des pièces d'assemblage destinées à soutenir le faîtage des combles neufs.
Tronquoy n'a pas opté ici pour l'épure, chère à Le Blanc dans la constitution de dossiers analogues. Il lui a préféré le lavis, agrémentant chaque feuille de touches chromatiques très élégantes. Grâce à plusieurs nuances de bleu, les matériaux fonte et fer sont donc indiqués. Sur la plupart des plans, il a choisi d'appliquer les couleurs en aplat, jouant subtilement sur l'effet des ombres portées. Mais la seconde planche, d'une extraordinaire virtuosité graphique, utilise le fondu pour décrire un angle du transept avec sa demi-ferme de noue. Eloigné dans son principe de prétentions purement artistiques, ce lavis pourrait presque se lire comme un Vasarely avant l'heure!
Grâce aux dessins de Tronquoy, le Portefeuille industriel s'est enrichi d'un dossier à la fois beau dans son graphisme et instructif en ce qu'il décrit avec concision la reconstitution partielle du grand sanctuaire. Mais surtout, de par sa chronologie, cette série du dessinateur prend place dans une période charnière : la première moitié du 19ème siècle. Un temps où fer et fonte s'immiscent progressivement dans l'architecture des ponts, des marchés, des galeries, des serres...
Et cette tendance s'affirmera durant toute la seconde moitié du siècle, du Crystal Palace de l'Exposition universelle de Londres, en 1851, à la tour de Monsieur Eiffel, en 1887-1889.
En 1839, lorsque le garde des Sceaux se rend sur le chantier de Chartres, la charpente nouvelle assure désormais le maintien de la toiture. En apparence, rien n'a changé dans l'allure de l'église. Cependant, une chirurgie discrète a substitué le métal roi au squelette de bois flambé.
Aujourd'hui une charpente en fonte, non moins remarquable, donne au comble un dégagement impressionnant avec une couverture en cuivre dont l'effet s'est affirmé avec la silhouette de la cathédrale sur l'horizon beauceron et qui demeure de nos jours l'une des singularités de la cathédrale.
Posé au seuil de ce qu’était la cathédrale de Fulbert, le labyrinthe de Chartres est un héritage gothique rare et de grande beauté. Bien des cathédrales de cette époque possédaient un tel motif mais, au cours des siècles, les chapitres cathédrals l’ont presque partout fait détruire. Des labyrinthes ont en effet existé dans les cathédrales de Reims, de Sens, d’Arras, d’Auxerre. A Chartres, fort heureusement, les chanoines ont su le garder. Son usage était probablement d’ordre religieux et spirituel. Hélas ce message est devenu, à la longue, incompris au point d’être totalement délaissé au début de notre siècle.
Le labyrinthe de la cathédrale de Chartres intrigue les personnes de notre époque qui se demandent ce qu'il peut bien signifier, et à quoi il pouvait servir à nos ancêtres. Inconsciemment, en se posant cette dernière question, ils commencent à trouver la solution, ils entrent dans la voie voulue par les concepteurs du labyrinthe.
Bien situé dans la nef et surtout bien conservé, il est parmi tous les labyrinthes de nos cathédrales l’un des plus grands. Aujourd’hui il en existe encore un à la cathédrale d’Amiens, à Saint-Quentin, et à Bayeux, dans la salle capitulaire. Ces labyrinthes, contrairement à celui de Cnossos, ne sont pas là pour égarer ceux qui s’y engagent ! Aucune fausse route, aucune impasse. Les méandres de cette immense « marelle » conduisent de toute façon au centre du dessin.
Le centre du labyrinthe de Chartres est le point de départ de toutes les grandes dimensions. Il date de 1200 environ. L’intelligence de l’architecte fut de développer un chemin aussi long que possible dans la surface la plus ramassée – un diamètre de 12 m 88 pour un chemin à parcourir de 261 m 50. Il lui manque la plaque en cuivre du centre qui fut fondue en 1793 avec les cloches pour fabriquer des canons.
Dans la cathédrale de Chartres, le labyrinthe est situé à la 3ème des 7 travées de la nef. Il partage en effet la nef en quatre grandes travées d’une part et trois autres travées d’autre part. En d’autres termes, son centre se situe à la limite des quatre travées égales en partant du carré central du transept, et juste avant les trois dernières travées de section différente. Cette division évoque les nombres 4 et 3, le quadrivium et le trivium des arts libéraux. Ils associent la matière et l’esprit. Sept est la somme de ces deux nombres qui, de tous temps, ont précisément été symboles de la matière et de l'esprit. Quatre étant par association symbole de la Terre et trois symbole du Ciel, nous pouvons en déduire que le labyrinthe est situé à l'intersection de la Terre et du Ciel.
La distance du centre du labyrinthe au centre du carré du transept est la même que celle de ce dernier à l’extrémité de la deuxième travée du chœur. Nous devinons ainsi toute l’importance que prend le labyrinthe dans la géométrie et le tracé de la cathédrale.
Le labyrinthe est malheureusement connu par le grand public pour les « forces » en son centre. Les appareils de la science actuelle n'ont jamais prouvé l'existence de forces telluriques, ce qui ne veut pas dire qu'elles n'existent pas, car certains, qui ne sont ni des illuminés ni des païens, ressentent quelque chose ! Mais la richesse du labyrinthe est d’une toute autre nature. C’est un héritage médiéval rare. Ce parcours pourrait symboliser le déroulement de la vie humaine, avec la victoire sur le mal.
Bien des symboles peuvent être tirés de ce dallage. Le premier est, sans nul doute pour les chrétiens, l’application du mythe de Thésée à la théologie. Thésée est dès lors assimilé à la figure du Christ, le Minotaure à celle du mal. Le labyrinthe rappelle le chemin long et sinueux que le héros crétois dut parcourir pour être victorieux. Le fil d’Ariane est en quelque sorte l’enseignement de l’Eglise permettant à tout homme, dans son combat spirituel, de ne point s’égarer et de devenir à son tour victorieux du mal.
Pour les chrétiens, le labyrinthe est un chemin symbolique qui mène l’homme de la terre à Dieu, un chemin où l’homme va à la rencontre de Dieu. Le centre de cette grande figure symbolise la Cité de Dieu. La démarche du labyrinthe ne consiste pas seulement à aller jusqu’au centre mais à en repartir. Le pèlerin est invité à emprunter la ligne tracée face à lui pour monter vers le chœur de la cathédrale, vers l'Orient, vers la lumière.
Le pèlerin du 13ème siècle parcourait ce chemin, en priant, comme s'il faisait un pèlerinage vers Jérusalem. C'est pourquoi les labyrinthes portaient le nom de « Chemin de Jérusalem » car au temps des croisades, nombreux étaient ceux qui parcouraient le labyrinthe par substitution faute de ne pouvoir partir en Terre Sainte. Le parcours du labyrinthe de Chartres, effectué à genoux, prenait autant de temps que de marcher une « lieue », d'où son autre nom : « la Lieue ».
A partir des redents extérieurs, des chercheurs ont cru y voir l’image d’une roue représentant le déroulement de la vie depuis la naissance (de l’extérieur) jusqu’à la mort (au centre). Cela signifierait que le paradis est au bout du chemin après une descente de l’homme en lui-même.
Une des racines du mot labyrinthe est « laborintrus », mot latin qui comporte la racine « labor », travail, dans le sens d'effort. De ce terme découlent plusieurs mots dont « labrum », sillon ouvert par le «labrus», nom donné à une hache à double tranchant, une de ces haches qui séparent le bien du mal, le haut du bas, le profane du spirituel. Peut-être est-ce là qu'il faut chercher l'origine des « forces » signalées au centre du labyrinthe, « forces » chthoniennes, sataniques, de dessous ? Le labyrinthe serait dans ce cas un « nœud » qui bloque toutes ces « forces » et sépare donc le profane du sacré dans un lieu saint. Cosmos était le sanctuaire de la hache, l'emblème du Roi, l'équivalent du Z de Zeus / Minos, la foudre qui relie la Terre au Ciel. La hache est l'instrument qui relie ou sépare le terrestre et le céleste.
Une autre origine du nom serait « labra » qui désigne les cavernes, les galeries de mines et « inthos » suffixe de racine pré-indo germanique qui se rapporte aux jeux d'enfants. Ainsi « labra – inthos », labyrinthe, désignerait les jeux de la caverne. Un lien possible peut donc exister avec la fameuse « Caverne » de Platon, entre les ombres et la lumière, entre l'alternance noir et blanc du labyrinthe, le long du parcours qui conduit du profane au sacré, de la nuit vers le divin.
Les labyrinthes existent dans le monde entier depuis des millénaires. Les plus anciens datent de 15 000 ans. On en trouve en Amérique, en Suède en Grande- Bretagne, Italie, Inde, Egypte et naturellement en France.
Fait de cavernes et de carrières, ces lieux sous terre étaient des lieux initiatiques. Le plus célèbre, celui de Cnossos, en Crête, formait une spirale se rétrécissant vers le centre en montant, pour déboucher à l'air libre. Dédale, son concepteur, a laissé accroché à son nom ce concept de complexité.
Peu à peu, les labyrinthes à trois dimensions, avec des voies sans issues, celles des errements et des culs de basses fosses, ont laissé place aux labyrinthes à deux dimensions et à une seule voie, menant au centre après des croisements et des retours en arrière. Façon comme une autre d'obliger au retour sur soi, à la descente dans son intériorité la plus intime.
Il en existe des circulaires (Saint Vital de Ravenne, Saint Savin de Plaisance, Sens, Guingan, Bayeux, Saint Michel de Pavie…), des carrés (Basilique San Reparatus d'Orléansville, Villa Diomède à Pompéi, San Bertin à Saint Omer…) et octogonaux (Saint Quentin, Arras, Reims, Amiens…), des géants et des petits. Globalement, avec cette évolution, l'appellation labyrinthe est devenue erronée, car il n'y a plus qu'un seul chemin.
Le labyrinthe de la cathédrale de Chartres, le troisième à être construit en France, en 1200, reprend la forme circulaire avec onze anneaux. Il n’est pas gravé dans la pierre mais incorporé dans le dallage. Il témoigne de recherches esthétiques et symboliques qui en font une œuvre unique.
Avec son motif central en forme de fleur, il témoigne de la spiritualité cistercienne qui a présidé à son incorporation dans l’édifice, de la puissance de l’Ecole de Chartres qui lui a donné ses dimensions précises et du désir de faire de la cathédrale de Chartres un modèle de perfection jusque dans ses moindres détails.
Pour John et Odette Ketley-Laporte, qui l’ont analysé avec minutie, « le labyrinthe de Chartres est le seul à être doté d’une bordure et d’un motif central. L’apparente simplicité de ces éléments dissimule une géométrie d’une étonnante complexité, porteuse d’un message symbolique de la plus haute spiritualité ».
L'homme qui part en pèlerinage avec un but géographique sur la planète, cherche à retrouver son créateur au travers de la manifestation qu'il traverse lors de son voyage et arrive, au terme de ses pérégrinations, en état de symbiose totale avec l'environnement créé par Dieu. Son voyage « initiatique » réel, est à la fois début, « init » de « initium » et fin. Il fait alors partie du tout ; il a rejoint l'Un, son créateur, totalement conscient de la part qu'il lui reste à jouer dans l'accomplissement de l'œuvre divine, dans la manifestation.
Comment mieux « qualifier » le Divin que par le mot « absolu » ? Or, « Absolum » était le nom du labyrinthe de Cnossos, celui du combat de Thésée et du Minotaure. Le combat de Thésée et du Minotaure rappelait le fameux labyrinthe de Cnossos dans l'ile de Crête. Ces labyrinthes étaient généralement appelés Dédale, en souvenir de l'architecte du roi Minos. Autrefois, une plaque de bronze représentant Thésée et le Minotaure était fixée au centre du labyrinthe de Chartres. Elle a été déposée.
L'homme qui parcours le labyrinthe, part dans un voyage initiatique virtuel. Il s'isole de la manifestation et se concentre sur lui-même, recherchant en lui les traces de la manifestation divine. Lui aussi arrive au bout de son voyage en parfaite communion avec Dieu. Il comprend progressivement par les allers et retours du parcours, qui le rapprochent et l'éloignent du Centre qu'il est nécessaire de chercher en allant de l'avant, mais qu'il est bon de regarder derrière soi, puisque tout a commencé « avant ».
« Au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu ».
Ses multiples allers et retours lui font comprendre la nécessité du retour sur soi, mais également à considérer une situation selon divers points de vues. Vieille nécessité de prendre de la distance afin de mieux juger, appréhender un problème. Le fait de croiser un autre pèlerin sur la voie, rappelle que seule l'expérience personnelle est valable. Un jour dans un sens, un jour dans l'autre, celui qui cherche trouvera et se sera enrichi au passage de « points de vues » apparemment opposés mais en réalité complémentaires d'une même et unique solution. Arrivé dans la dernière ligne droite, il se prépare à rencontrer celui qu'il sait être présent, «celui qui est et a toujours été», au centre. Là, il est obligé de se relever, comme aspiré vers le haut, seule voie de sortie du labyrinthe. En effet, la seule autre alternative, serait la mort.
A l'angle formé par le transept sud avec le bas-côté de la nef, une dalle grise disposée en biais retient un clou. A mi-hauteur, dans le vitrail, un verre incolore rond laisse passer un trait de lumière.
C'est le chanoine Claude Estienne, qui en 1701, fit placer cet ensemble afin de vérifier la marche des horloges et des montres. En effet, le 24 juin, fête de saint Jean-Baptiste, le rayon du soleil frappe précisément le clou quelques minutes avant 14 heures, par rapport au décalage de Chartres sur le méridien de Greenwich. Plusieurs interprétations telluriques ou autres sont faites sur ce lieu...
« L'intention des concepteurs de la cathédrale était de monter en spectacle les vérités dont ils s'approchaient par la méditation et le raisonnement, de donner à voir ce que le chrétien doit faire pour bien se conduire et être sauvé ». G. Duby.
C'est cette intention que l'on a pu remarquer dans les portails et que l’on retrouve également dans les vitraux.
Après avoir contemplé l’immense décor sculpté des portails et des porches, un nouveau monde de personnages, de légendes et de symboles nous attend dans la cathédrale. La beauté de la cathédrale de Chartres ne naît pas seulement de ses sculptures : ses vitraux lui composent aussi une parure étincelante. Cent quarante-six fenêtres sont garnies de vitraux anciens, avec 1 359 sujets, d’une variété infinie : légendes de saints, personnages de l’Ancien et du Nouveau Testament, membres des corporations ayant offert les vitraux.
Les vitraux qui garnissent les fenêtres et les roses sont au nombre de 176 et couvrent une superficie de plus de deux mille mètres carrés. Ils illustrent la Bible, la vie des saints et les vieux métiers de France. Leur disposition dans la cathédrale, comme la composition interne de chaque verrière, ne relève pas du hasard : soulignons l'opposition nord - sud (ombre - lumière) entre l'Ancien et le Nouveau Testament, l'opposition fenêtres hautes et fenêtres basses entre l'Eglise mystique et l'Eglise militante. Tous ces vitraux sont l’œuvre des artistes du 13e siècle, sauf trois vitraux de la façade occidentale et quatre qui échappèrent au grand désastre de 1194.
C’est le plus bel ensemble qui existe, la plus riche collection qui soit. Il serait sans lacunes si les chanoines du 18ème siècle n’avaient fait disparaître quelques verrières pour donner plus de lumière au chœur et si la Révolution n’en avait détruit encore quelques autres.
Les figures isolées de grandes dimensions trônent dans les fenêtres hautes de la cathédrale qui éclairent la nef. Elles se détachent sur des fonds d’un bleu ou d’un rouge profonds. Les chairs ont des nuances d’un blanc rosé, verdâtre ou jaune. Le vitrail ne vise pas à reproduire la réalité, les couleurs sont faites uniquement pour réaliser de brillantes compositions.
Tous ces vitraux sont des dons et toutes les classes de la société ont voulu contribuer à la beauté de la nouvelle cathédrale. C’est dans la partie basse de la plupart des verrières, ou dans la rose qui les surmonte, que se situent les donateurs, figures tout à fait étrangères à la légende que raconte l’artiste.
Quarante-deux vitraux ont été donnés par les corps de métiers de la ville, quarante-quatre par les rois et les grandes familles féodales, seize par les ecclésiastiques et quatorze par des personnages représentés, mais dont on ne connaît ni le nom ni la condition sociale. Les clercs semblent avoir été moins généreux que les laïcs mais ce n’est probablement là qu’une apparence car il est beaucoup de vitraux sans signature qui furent sans doute offerts par des ecclésiastiques indifférents au souvenir des hommes.
Ces images de donateurs sont fort intéressantes car elles nous montrent tous les corps de métiers au travail. Parfois les donateurs sont agenouillés au bas du vitrail. C’est ainsi que sont représentés des membres de la famille royale de France et de Castille, et les principales familles seigneuriales du temps : Champagne, Boulogne, Chartres, Dreux.
Dans certains cas, deux figures sont superposées. Ainsi, sous la grande rose du bas du transept, les quatre Évangélistes sont à califourchon sur les épaules des quatre grands prophètes.
Les scènes empruntées à l’Ancien et au Nouveau Testaments occupent des médaillons se détachant sur des fonds de rinceaux riches et variés. Les personnages sont de petite taille. Ces médaillons se trouvent aux fenêtres des bas-côtés, du déambulatoire, des chapelles.
Les sujets des fenêtres basses montrent l’esprit inventif des verriers ; on y voit la légende de saint Nicolas, de saint Eustache, saint Martin, l’histoire de Noé, de Joseph, qui se poursuivent sur les médaillons, épisode après épisode, un peu comme les bandes dessinées des journaux actuels. C’est ainsi que l’histoire de Joseph comprend trente scènes et celle de saint Théodore trente-huit. Mais cette abondance n’engendre pas la confusion : les scènes sont groupées dans des médaillons de formes diverses, encadrés par les fers scellés dans les montants de la fenêtre. Les médaillons se détachant nettement sont infiniment plus lisibles.
C’est Suger, abbé de Saint Denis, qui a suggéré l'idée d'une architecture de lumière, symbolisant la présence divine. C'est le vitrail qui va transfigurer la lumière. L'ensemble des vitraux – 2 600 m2 – conservés à la cathédrale est sans doute le plus complet et le plus beau de tout l'Occident chrétien.
Trois vastes fenêtres qui s’ouvrent au-dessus du Portail royal et leurs fragiles verrières ont échappé à l’incendie de 1194. Ces trois grands vitraux du 12ème siècle nous donnent une haute idée du talent des anciens maîtres verriers. Les vitraux du 12ème siècle sont rares et c’est une heureuse fortune d’avoir conservé ceux-là.
Les trois vitraux de la façade représentent l’arbre de Jessé, et les deux autres la vie de Jésus-Christ. Le premier de ces deux vitraux narratifs est consacré à l’enfance de Jésus. Il est dominé par une grande figure de la Vierge. Le second commence à la Transfiguration et raconte la Passion tout entière.
Selon la tradition chrétienne, ce vitrail représente les ancêtres royaux du Christ. Il était difficile de traduire par des formes avec plus de grandeur cette prophétie d’Isaïe : « Il sortira un rejeton de la tige de Jessé, et une fleur s’épanouira au sommet de la tige, et sur elle reposera l’esprit du Seigneur ».
Au centre, et de bas en haut, Jessé est allongé sur un lit recouvert d’une toile de lin blanc. Un grand arbre sort de Jessé endormi. Nous reconnaissons ensuite successivement des rois assis les uns au-dessus des autres : David, Salomon, Roboam et Abia. Ils forment la tige de cet arbre symbolique qui se termine par la Vierge. Au-dessus de la Vierge trône le Christ entouré des sept colombes du Saint-Esprit qui symbolisent les sept dons du Saint-Esprit.
A gauche et à droite, des deux côtés de l’arbre, se superposent les quatorze prophètes de l’Ancien testament, annonciateurs du Messie à travers les âges.
Ils tiennent des rouleaux appelés phylactères sur lesquels est inscrit leur nom. Ainsi, d’un côté se trouvent représentés Nahum, Ezechiel, Isaïe, Moïse, Samuel, Zacharie et Habachuc. De l’autre côté, Joël, Osée, Michée, Balaam, Amos, Daniel et Sophonie. Remarquons la présence du nombre quatorze, déjà rencontré à la façade occidentale, symbolisant David.
Le vitrail de l’enfance de Jésus est fait de médaillons alternativement carrés et circulaires, dont les fonds sont tour à tour d’un rouge de braise et d’un bleu profond.
C’est un grand vitrail haut de onze mètres et large de trois mètres quatre-vingt.
L’histoire commence en bas avec l’Annonciation, la Visitation et la Nativité et se poursuit avec l’annonce aux bergers. Nous distinguons ensuite les rois mages qui s’en vont consulter Hérode. Dans le panneau suivant, au troisième rang, les rois mages suivent l’étoile. Jésus, sur les genoux de la Vierge les bénit alors que dans le panneau suivant, les rois mages s’en retournent.
Dans la rangée au-dessus, nous distinguons des femmes portant des chandelles car c’est le jour de la chandeleur que se fête la Purification. Une troisième femme porte une tourterelle car, lors de la présentation d’un enfant au temple, on en sacrifiait un couple. Viennent ensuite les épisodes du massacre des Saints Innocents ordonné par Hérode. La Sainte Famille s’enfuit et arrive à Sotinen : c’est le thème des panneaux du sixième rang tandis qu’au-dessus les idoles égyptiennes s’écroulent. Un ange prévient Joseph qu’il peut rentrer. Jésus est baptisé alors qu’au-dessus nous voyons l’entrée à Jérusalem.
Le haut du vitrail est occupé par Marie tenant Jésus sur ses genoux. Elle est entourée d’anges tenant des sceptres. Au-dessus, nous voyons le soleil. La lune est représentée sous forme d’un croissant. Ces deux astres symbolisent l’Ancien et le Nouveau Testament.
Placé à gauche du vitrail représentant l’enfance du Christ, le vitrail de la Passion est composé de quatorze panneaux qu’il convient de lire de bas en haut et de gauche à droite. Les scènes se détachent sur un bleu surnaturel. Ni le ciel de l’Orient, ni les plus précieux saphirs ne peuvent rivaliser avec ce bleu qui émeut comme une révélation d’un autre monde.
Le premier panneau représente la Transfiguration. C’est l’aboutissement de la vie humaine du Christ mais un aboutissement dont il avait eu la prescience. C’est pourquoi ce panneau se trouve au début de la fresque.
A droite Jésus arrive de la montagne, entouré de trois apôtres tandis qu’au-dessus est figurée la Cène et l’institution de l’Eucharistie, puis le lavement des pieds de Pierre par Jésus. Le panneau suivant représente Judas, le traître, embrassant Jésus au milieu des scènes de violence qui opposent Pierre à un garde.
Enfin dans quatre panneaux figurent l’agonie, la flagellation, la crucifixion, la descente de croix et la mise au tombeau qui vont précéder les cinq dernières scènes représentant la résurrection et l’apparition de Jésus à Marie-Madeleine et à ses disciples avant de quitter la terre.
Autre vitrail du 12ème siècle, échappé à l’incendie de 1194, « Notre-Dame de la Belle Verrière » se voit aujourd’hui dans la première fenêtre du bas-côté méridional du chœur. Il représente la Vierge portant l’Enfant avec majesté au milieu de sa poitrine. La grandeur hiératique de son attitude, le bleu de sa robe aux plis circulaires, et enfin l’aspect solennel de l’Enfant font reconnaître un panneau du 12ème siècle enchâssé dans un vitrail plus récent mais de mêmes dimensions. En effet, les larges bordures décorées d’anges, ainsi que les parties basses de la verrière où les noces de Cana et la tentation de Jésus-Christ sont racontés dans un style différent, présentent les caractéristiques de l’art du 13ème siècle.
Situés dans le déambulatoire sud, ces trois panneaux provenant de l’édifice précédent sont généralement considérés comme les plus anciens.
Notre-Dame est entourée d’anges et est surmontée de la Colombe de l’Esprit-Saint. Quatre anges supportent son trône. Dans les premiers panneaux, nous voyons les épisodes des tentations du Christ ainsi que le miracle des noces de Cana. Saint Jean relate dans son évangile qu’il s’agit là du premier signe de Jésus. C’est à Cana qu’il ouvre sa mission rédemptrice. Marie prend conscience que sa présence comme mère s’achève ici. « Faites ce que mon fils vous dira » (Jean 4, 5) sont les derniers mots que les évangélistes ont retenus de Marie.
Démonté en vue d’une restauration, ce vitrail a été remis en place le 21 décembre 1990.
Analysons à présent quelques vitraux du 13ème siècle. Le visiteur de passage ou l’archéologue qui cherche ont souvent difficile à déceler les véritables différences de style entre les nombreuses verrières des fenêtres hautes, des fenêtres basses et des roses. Aucun décor ne semble en effet avoir plus d’unité !
Le chanoine Y. Delaporte a discerné trois groupes de vitraux.
1. Le premier groupe est formé par ceux de la nef et de ses bas-côtés.
Les plus beaux, ce sont aussi les plus anciens et probablement antérieurs à 1215.
Les saints représentés sur les fenêtres de la nef, avec leur haute taille, leur immobilité solennelle, leur regard sévère, leurs belles draperies retombant sur les pieds et s’évasant en calice de fleur, ont toutes les qualités qu’exigent des figures faites pour être vues d’en bas et à une grande distance.
Les vitraux des collatéraux de la nef datent de la même période et sont parfois dus au même artiste mais ils sont conçus tout autrement. Il n’y a plus de hautes silhouettes mais des petits personnages enfermés dans une suite de médaillons qu’il faut déchiffrer de près, en commençant par le bas, pour y découvrir les chapitres successifs de l’histoire d’un martyr, d’un confesseur ou d’un patriarche. Quelques-uns de ces vitraux sont d’une grande perfection décorative.
2. Le second groupe comprend les vitraux du chœur ainsi que ceux du déambulatoire et des chapelles rayonnantes.
Dans les vitraux du chœur ont été représentés, sous les images des saints, quelques personnages illustres du commencement du 13ème siècle, en humble posture. Ces vitraux ont dû être exécutés entre 1215 et 1220. Ceux du déambulatoire et des chapelles rayonnantes, bien qu’entrepris en même temps, n’ont probablement été terminés que vers 1230. Les uns et les autres ne diffèrent que par quelques particularités de ceux de la nef et des bas-côtés. Le décor ornemental a souvent moins de perfection.
3. Le troisième groupe est formé par les deux grandes roses des croisillons du transept et les claires-voies qui les accompagnent.
Ces deux magnifiques ensembles sont à peu près contemporains et datent des environs de 1230. Lorsque nous nous tenons à la croisée du transept, trois grandes roses s’offrent à nos regards. Un silence admiratif s’impose ! C’est dans les bras du transept que se trouvent les vitraux qui furent mis en place les derniers. Ils représentent les apôtres et témoignent par un dessin un peu négligé et par un coloris moins éclatant d’une certaine hâte à achever le décor des fenêtres. Il importe de remarquer qu’à Chartres l’œuvre des verriers accompagne les progrès de la construction. Les vitraux de la nef et des bas-côtés, quasi aussi perfectionnés que ceux du 12ème siècle, témoignent que cette partie de la cathédrale a été construite la première et a précédé le chœur, tandis que le caractère des vitraux des fenêtres hautes du transept indique cette partie de l’église comme la plus récente.
La Rose occidentale est la première rose édifiée dans cette cathédrale. Le remplage (structure en pierre de la rose) tient encore une grande place. Mais déjà en cette rose, on décèle toute la dynamique de l’art gothique.
La Rose occidentale, consacrée au Jugement dernier et dont le donateur est inconnu, domine majestueusement le Portail royal de ses 13 mètres 50 de diamètre comme elle surplombe aussi les trois merveilleuses lancettes qui représentent l’Arbre de Jessé, l’enfance du Christ et sa Passion.
Il est frappant de constater que le nombre douze se retrouve dans toutes les scènes de cette rose : douze lobes, douze colonnettes, douze quatre-feuilles.
Le Christ dans le vitrail central montre ses plaies aux vivants et aux morts qu’il vient de juger. Des anges sont inscrits autour de lui dans un premier cercle. Certains présentent les instruments de la Passion. D’autres jouent de la trompette. De part et d’autre du Christ figurent les apôtres, deux par deux. Au sommet de ce cercle, Abraham accueille en son sein les élus. Dans le bas, saint Michel pèse les âmes tandis qu’un diable essaie de faire pencher la balance de son côté. A gauche un ange conduit les élus. De l’autre côté, un diable se saisit des damnés.
La Rose nord, dans la pénombre, la troisième dans l’ordre d’édification des roses, a été offerte par Blanche de Castille et Saint Louis. Elle montre les lis de France et les tours de Castille : c’est un don de la mère de Saint Louis au temps de la minorité de son fils. C’est en effet à l’époque de Saint Louis que furent ajoutées les trois grandes roses qui illuminent la cathédrale. Avec son décor intact de sculptures et ses vitraux du 13ème siècle, Chartres est parvenue à nous dans l’état où la vit Saint Louis, miraculeusement préservée. Elle célèbre à la fois la Vierge et son fils.
Assise sur un trône, la Vierge Marie tient un sceptre dans sa main droite et porte l’Enfant Jésus qui bénit le monde. Autour d’elle, trois cercles de douze panneaux. Des colombes et des anges forment un premier cercle autour d’elle. Viennent ensuite les rois de Juda, ses ancêtres, assis dans des médaillons carrés qui forment le second cercle. Douze petits prophètes la couvrent de louanges dans un troisième cercle.
Au bas de la rose, dans les écoinçons, nous distinguons huit vitraux plus petits qui présentent en alternance les armes de la maison de France, lys d’or sur champ d’azur et celles de Castille, berceau de la reine Blanche, mère de Saint Louis.
Au pied de la rose, emplissant les cinq lancettes de la claire-voie, nous distinguons des personnages solennels de haute stature et debout : de gauche à droite, Melchisedech tenant une coupe de vin avec un pain rosé dessus et balançant un encensoir. A ces emblèmes de la foi est opposé en dessous Nabuchodonosor, prosterné devant une idole faite d’or, d’argent, de fer et d’argile. Vient ensuite David, auteur de psaumes, représenté avec sa cithare. Il surmonte Saül à qui il a succédé et qui se suicide en se perçant le corps avec son épée. Au centre sainte Anne porte Marie dans ses bras. A sa droite, Salomon dont la sagesse s’oppose à la folie de Jéroboam qui fait élever des veaux d’or. Enfin, Aaron tient un rameau et le Livre de la loi. Il porte le pectoral orné de pierres précieuses des prêtres tandis qu’au-dessus, Pharaon est jeté à terre et s’abîme dans les flots en poursuivant le peuple de Dieu lors du passage de la Mer Rouge.
Le temps a donné à quelques-unes de ces figures un caractère grandiose et terrible : le teint brun d’Aaron et de Melchisedech est devenu noir et le blanc de leurs yeux éclaire de sombres visages d’Éthiopiens. Sainte Anne elle-même semble une princesse de l’Inde. Mais le bleu de la rose, ce bleu des armes de France, verse sur ce grand ensemble son apaisement et sa douceur.
La Rose sud, éblouissante en plein soleil du midi, a été offerte par Pierre Mauclerc, comte de Dreux puis duc de Bretagne, un des grands bienfaiteurs de la cathédrale. Il figure à droite tandis que sa femme, Alix de Bretagne, se trouve à gauche. Leurs enfants ont été représentés à chaque extrémité. Les armes de la famille se retrouvent sur chacun d’eux.
La Rose du midi célèbre le Christ dans l’éternité. L’ensemble reprend la vision de l’apôtre Jean découvrant Jésus assis sur un trône, bénissant le monde de sa main gauche et tenant un calice de la main droite. Autour de lui, disposés dans trois cercles de couleur et de lumière, rayonnent des animaux symboliques. Dans un premier, nous reconnaissons un lion qui représente saint Marc, un bœuf qui représente saint Luc, un aigle saint Jean et un homme saint Mathieu, ainsi que huit anges thuriféraires.
Dans le second cercle nous reconnaissons les vingt-quatre vieillards musiciens de l’Apocalypse portant des coupes d’or. Certains jouent de la harpe, d’autres de la cithare ou de la viole. Ils célèbrent les louanges de l’Éternel.
Sous cette rose, cinq grandes lancettes constituent une sorte de résumé de ce que nous disent sculptures et vitraux. Dans la lancette centrale, la Vierge tient l’Enfant Jésus dans ses bras.
La claire-voie nous ramène du ciel sur la terre. Elle nous rappelle que le Christ triomphant nous a été annoncé par l’Ancien Testament aussi bien que par le Nouveau et qu’entre les deux livres il y a une harmonie profonde. En effet, de chaque côté, comme pour marquer la continuité d’un Testament à l’autre, quatre grands prophètes portent sur leurs épaules les quatre évangélistes, le regard tourné vers Jésus et sa mère. De gauche à droite, nous reconnaissons Jérémie et saint Luc, Isaïe et saint Matthieu puis Ézéchiel et saint Jean l’Évangéliste, Daniel et saint Marc. Cela signifie que les évangélistes trouvent dans les prophètes leur point d’appui, mais qu’ils voient de plus haut qu’eux et de plus loin. Les figures sont graves. Malgré l’étrangeté de leur pose, elles restent nobles.
C’est surtout Notre-Dame que le clergé de Chartres a voulu honorer. C’est pourquoi une vingtaine de roses ou de verrières lui sont consacrées. Tantôt l’artiste a raconté quelques épisodes de son histoire, tantôt il l’a représentée seule avec l’Enfant Jésus.
Ce très beau vitrail, fortement représentatif de la confiance en Marie des hommes du 13ème siècle, fut offert par les cordonniers, en pleine activité dans la partie basse du vitrail. De bas en haut, nous apercevons la Vierge sur son lit de mort. Elle est entourée par les apôtres ainsi que par des femmes. Au-dessus, son âme est présentée au Christ par des anges tandis que son corps est transporté par sept apôtres avant d’être déposé dans un sarcophage bleu. Enfin ressuscitée, elle est couronnée par son fils qui l’installe à sa droite alors que le Saint Esprit est figuré sous la forme d’une colombe.
Bien qu’il n’ait conservé que sa partie basse, le vitrail suivant mérite une attention particulière.
Installé dans le bas-côté sud, ce vitrail, moins admiré que d’autres, est pourtant celui qui symbolise le mieux la raison pour laquelle la cathédrale fut consacrée à Marie. Il est l’aspiration de tous ceux qui souffrent et qui attendent un soulagement par l’intermédiaire de la mère du Christ.
On y voit représentés deux lourds véhicules à quatre roues chargés, l’un de sacs gonflés, l’autre d’un grand tonneau. Ce ne sont pas des chevaux qui y sont attelés mais des hommes, et, au-dessus de leur tête, une bannière se déploie. Ces chariots se dirigent vers une statue de la Vierge qu’entourent des pèlerins en prière. Il s’agit d’un des épisodes racontés par le « Livre des miracles de Notre-Dame de Chartres ». Nous reconnaissons ces paysans des villages de la Beauce s’attelant aux chars et venant apporter du blé, du vin, des pierres, de la chaux aux ouvriers qui rebâtissaient la nouvelle cathédrale après l’incendie de l’ancienne en 1194. La statue vénérée par les pèlerins, que domine la Vierge assise sur son trône dans le ciel, c’est Notre-Dame de Chartres. Nous sommes donc ici en présence d’un souvenir d’un événement presque contemporain dont l’artiste avait pu être le témoin.
Dans la partie basse, nous apercevons des pèlerins en prière tandis que d’autres tendent des offrandes ou plus simplement une béquille, gage d’un miracle. Partout la Vierge présente un visage de bonté vers ceux qui font appel à elle.
Ce vitrail fut offert par la corporation des bouchers. Trois grands quatre-feuilles ont été abîmés lors d’un nettoyage et ont été remplacés par du verre blanc jusqu’en 1927, date à laquelle ils ont été reconstitués dans l’esprit du 13ème siècle.
C’est ainsi que nous pouvons à présent contempler dans le premier un architecte au milieu des compagnons ; dans le deuxième, le passage de la Sainte-Châsse au milieu des déshérités ; dans le dernier, la Vierge en compagnie des prophètes et de saint Yves et saint Fulbert, anciens évêques de Chartres.
Mais le clergé de Chartres a aussi cru devoir respecter les dévotions particulières de chacun. C’est ainsi que cinq vitraux ont été consacrés à saint Nicolas et quatre à saint Martin !
Examinons successivement les vitraux consacrés à saint Nicolas, à saint Joseph, à saint Apollinaire, à saint Jean l’Évangéliste, à saint Eustache, à saint Lubin, à Noé.
L’histoire légendaire de saint Nicolas commence par sa naissance, son bain par deux femmes et le refus du lait maternel. La légende voulait que dès l’enfance, il jeûnait le vendredi.
Après avoir montré saint Nicolas étudiant, le deuxième médaillon central relate l’épisode d’un père si pauvre qu’il s’apprête à livrer ses filles à la prostitution. Saint Nicolas les sauve en lançant une bourse. Le père le remercie en se jetant à ses pieds. Un autre médaillon nous montre Saint Nicolas nommé évêque.
Au troisième médaillon central, saint Nicolas rend à ses parents un enfant après qu’il fut tombé à la mer.
Dans les médaillons des côtés, c’est l’histoire de l’aubergiste assassinant ses hôtes à l’aide de sa femme.
Tout en haut, un emprunteur de mauvaise foi reçoit de l’argent d’un juif. Il dissimule l’argent dans une canne creuse alors qu’il fait tenir celle-ci par le prêteur. Il jure sous l’image du saint qu’il ne doit rien. L’emprunteur est écrasé par un attelage et les pièces se répandent en sortant de la canne creuse.
Les merciers et les apothicaires que l’on voit au bas du vitrail sont les donateurs de ce vitrail.
L’histoire contée par ce vitrail commence par le songe de Joseph apercevant le soleil, la lune et les étoiles. Nous voyons ensuite Jacob envoyant son fils garder les moutons avec ses frères. Ceux-ci, ayant décidé de le faire disparaître, le descendent dans une citerne pour finalement le vendre. Ils montrent à leur père son vêtement qu’ils ont taché de sang. Vient ensuite l’épisode où la femme de Putiphar tente de séduire Joseph et le fait jeter en prison après avoir été éconduite par celui-ci. Joseph qui a commenté les rêves de ses compagnons de prison explique à Pharaon son rêve qui concernait les sept vaches grasses et les sept vaches maigres.
Dans la partie suivante, les égyptiens sont occupés à remplir leurs greniers tandis que les fils de Jacob, représentés sur des dromadaires, envoyés par lui en Egypte retrouvent leur père qui leur pardonne en leur offrant un repas. L’histoire se poursuit dans les épisodes du dernier grand panneau : les fils de Jacob sont accueillis par leur père lors de leur retour. Jacob part en Egypte et retrouve son fils. La lecture du vitrail se termine par un Christ en majesté. Les changeurs sont les donateurs de ce vitrail. Ils sont représentés de part et d’autre du premier grand panneau.
Le haut du vitrail nous présente le martyr de saint Apollinaire. Toute la partie inférieure du vitrail nous décrit la période de sa vie durant laquelle il a accompli des miracles. C’est ainsi que nous le voyons guérir un enfant paralysé, baptiser et soigner des malades. Puis c’est l’exil durant lequel il exorcise un possédé et ramène une femme morte à la vie.
La partie inférieure comporte une grisaille du 14ème siècle où sont représentés Guillaume de Thierry devant la Vierge, saint Cyr, saint Sulpice et saint Mathurin.
Le vitrail de saint Jean l’Évangéliste nous montre la vie du saint avec des épisodes extraordinaires comme les jeunes gens brisant des pierres précieuses que saint Jean reconstitue en enseignant la charité.
Dans le troisième médaillon central, l’apôtre boit la coupe empoisonnée devant Aristodème. A côté, nous pouvons voir la préparation du poison avec des serpents écrasés. Les armuriers sont les donateurs de ce vitrail.
En commençant par le bas, nous voyons Placide qui deviendra saint Eustache. Tout autour figurent des scènes de chasse. Ensuite, lui et sa famille quittent leur pays et continuent leur voyage en bateau.
Ne pouvant payer, il est précipité par dessus bord tandis que sa femme est prise en otage. Tout autour, des soldats envoyés par l’empereur le recherchent. Ils le trouvent et lui parlent. Ses fils le reconnaissent.
En remontant, nous découvrons Eustache au milieu d’un gué alors qu’un lion emporte un de ses enfants et qu’un loup en emporte un autre. Puis il retrouve sa femme.
Les trois derniers panneaux représentent son martyr et celui de sa famille car ils n’ont pas voulu adorer les idoles de l’empereur.
Les panneaux représentant les donateurs entourent le deuxième vitrail central : il s’agit des drapiers et des fourreurs.
La lecture de ce vitrail débute avec les marchands de vin donateurs du vitrail. Ce thème est repris dans la plupart des petits médaillons compris dans la bordure tout autour de celui-ci. Les autres panneaux racontent la vie du saint.
L’histoire commence par une procession. Devant une ville, saint Lubin se trouve au milieu de ses moutons. Il rencontre un moine qui lui apprend à lire en suivant un alphabet sur sa ceinture.
Les médaillons centraux présentent successivement un attelage transportant un tonneau, un homme tirant le vin de ce tonneau et un prêtre célébrant la messe. Les autres scènes sont des évocations de saint Lubin apprenant à écrire, devenant moine, enfin sacré évêque et tenant un vase d’eau.
Citons encore :
Dans la description des vitraux, comme dans celle de la statuaire, il faut pouvoir se limiter à l’essentiel. Terminons donc cette analyse des vitraux par l’histoire de Noé.
Le thème d’un Dieu créateur se retrouve dans l’histoire de Noé que nous découvrons en entrant dans la cathédrale sur le premier vitrail au fond du bas-côté nord. Dieu avait créé l’homme d’une manière admirable. Il le recrée d’une manière plus admirable encore dans le Christ. Noé en est déjà le symbole. Quant à l’arche, elle peut préfigurer l’Eglise, l’eau, le baptême…
En effet, nous pouvons lire la terrible aventure de Noé comme la volonté du Très Haut de recréer un monde brisé par le péché des hommes : du meurtre d’Abel à l’orgueil démesuré des constructeurs de Babel. Le déluge est une sorte de purification générale par l’eau.
L’arche salvatrice permettra à un couple unique de chaque espèce, échappant à la sanction divine, de donner naissance à une lignée nouvelle. Nul doute que bien des symboles vont illustrer ce récit.
Le sens des premiers panneaux est difficile à déchiffrer. Aussi, examinons les sept carrés sur pointe et quelques quatre-feuilles ou demi-cercles qui les entourent.
Dans le premier médaillon central, Dieu parle à Noé et lui demande de construire l’arche. Les fils de Noé observent la construction que nous voyons dans le médaillon central suivant.
Au deuxième médaillon, Noé se met au travail tandis que dans les deux quatre-feuilles et les deux demi-cercles qui jouxtent la construction de l’arche, les créatures, en commençant par l’homme, entrent par couple dans l’arche.
A la hauteur du troisième carré sur pointe, le demi-cercle de gauche nous montre encore l’entrée des derniers animaux. Remarquons le dessin assez fantaisiste du dromadaire. Il est grand temps que les derniers animaux rejoignent l’embarcation car, à droite et au-dessus de l’arche, les vivants, hommes et animaux, sont noyés par le flux dévastateur.
Le troisième médaillon central montre l’arche sur les flots. Elle est soulevée par les vagues du déluge, et parmi les animaux sauvés par le patriarche, à côté du cheval et de l’éléphant, nous voyons un griffon ailé au bec d’aigle.
Mais bientôt l’espoir va revenir : le quatrième panneau central représente la colombe s’envolant de l’Arche. Elle vole de gauche à droite d’abord sans rien transporter puis revient vers l’arche tenant un rameau vert dans le bec.
Les deux quatre-feuilles du registre suivant illustrent la décrue. A droite, les eaux ayant commencé à baisser, la colombe revient avec un rameau d’olivier. Au-dessus, les eaux continuent à baisser. Après la fin du déluge, Noé lâche tous les animaux, ceux-ci continuent à sortir de l’Arche. Le carré sur pointe, toujours dans l’axe central, nous montre Noé passant la tête par la lucarne. Il voit ainsi s’éloigner ceux qui désormais devront engendrer pour repeupler la terre.
Les derniers registres sont consacrés à la vie des hommes après le Déluge : au centre, c’est la malédiction de Cham.
Les deux quatre-feuilles qui surplombent montrent, à gauche, la culture de la vigne tandis qu’à droite la famille de Noé est agenouillée.
L’avant-dernier panneau central et ceux qui l’entourent nous présentent une scène de vendange. C’est la cueillette du raisin, le pressoir et la fabrication du vin ; à droite, le vin est dégusté. Noé goûte le vin.
Le dernier carré sur pointe révèle la nouvelle Alliance de Dieu : en haut du vitrail, Dieu est accoudé sur l’arc-en-ciel, signe de l’Alliance qu’il propose à l’humanité.
Hélas, comme la première création, la seconde à partir de l’arche, connaîtra encore le péché. Il faudra donc désormais attendre la venue d’un Sauveur, celui que les prophètes annoncent et que la Vierge Marie mettra au monde.
Dans le bas on peut voir des médaillons représentant les charrons et les tonneliers qui sont les donateurs de ce vitrail.
Comme nous venons de le constater, les verrières de Chartres proposent d’innombrables sujets à l’attention des fidèles. Le vitrail du « Bon Samaritain » est un vitrail dogmatique où sont enseignées les profondes résonances de la parole divine.
Comme son nom l’indique, il est consacré à l’histoire du « Bon Samaritain », la plus touchante peut-être des paroles évangéliques. Les docteurs du Moyen Age y voyaient une leçon de charité mais ils y discernaient aussi des mystères cachés, ce que nous dévoile le vitrail par sa composition singulière.
« Le Bon Samaritain » est un exemple de vitrail narratif. Il est situé dans le bas-côté sud, à l’étage inférieur à la 3e fenêtre. Il s’agit d’une verrière de 8 m de haut sur 2,5 m de large environ, une mosaïque de quadrilobes eux-mêmes insérés dans d'autres quadrilobes, soit au total 24 médaillons dans lesquels sont enfermées les scènes. Un premier regard fait apparaître deux histoires. Dans la partie inférieure, c’est le récit de la parabole du « Bon Samaritain ». Dans la partie supérieure, c’est le récit de la Genèse avec la création d’Adam, puis celle d’Eve et l’épisode de la perte du paradis terrestre. C’est enfin l’histoire de Caïn et Abel. Tout en haut se trouve le Rédempteur.
Le vitrail se lit de bas en haut et de gauche à droite.
En ce qui concerne les couleurs, nous sommes en présence d’un ensemble à dominante bleue dans lequel nous repérons les cinq médaillons du centre à fond rouge.
La parabole du « Bon Samaritain », extraite de l’Évangile de saint Luc (10, 29 – 37), est trop souvent présentée comme une simple leçon de charité chrétienne. Au 13ème siècle cette parabole était le support d'une réflexion théologique importante. Le thème du Bon samaritain, repris fréquemment au Moyen Age, par exemple à Sens et à Bourges, livre un message théologique de grande portée.
Nous avons donc vu que toute la partie basse était consacrée au récit de l’Évangile mais la seconde partie du vitrail n’est qu’un commentaire interprétant le texte. Suivant la pensée des docteurs du Moyen Age, l’histoire du voyageur est celle de l’humanité tout entière. Le voyageur, c’est l’homme : il est attaqué par une troupe de voleurs, c’est-à-dire par la réunion des péchés, qui fondent sur lui et le dépouillent de sa tunique, symbole de son immortalité. Le Bon Samaritain est le Christ lui-même, qui conduit l’homme dans l’Eglise. Au médaillon n° 9, le Samaritain a pris les traits du Christ.
Au médaillon n° 11, l'hôtelier symbolise l'Eglise qui accueille, et les quatre chevaux représentent les quatre Évangiles que l'Eglise doit répandre pour guérir l'humanité blessée.
En général, un vitrail se lit de bas en haut et de gauche à droite. Dans la cathédrale de Chartres, l’entorse la plus significative à cette règle est celle du vitrail de la Rédemption qui doit se lire de haut en bas avec une portée symbolique évidente.
L’idée profonde de ce vitrail est de montrer la continuité entre les deux Testaments, en faisant des parallèles entre des scènes de l’un et de l’autre Testament.
Les vitraux de Chartres forment un ensemble éblouissant qu’aucun autre n’égale. Un petit nombre de tons, le bleu, le rouge, un peu de jaune et de vert, quelques touches de blanc, et parfois un peu de brun qui tend à la pourpre violette, font naître par leurs rapports exquis une harmonie qui nous enchante. Toutes ces couleurs s’éveillent avec les ciels éclatants, s’assoupissent avec les ciels voilés. Elles emplissent la cathédrale d’une lumière irréelle qui se métamorphose avec les heures du jour et les nuages qui passent. Éclatantes ou apaisées, elles ouvrent le monde du rêve.
La cathédrale de Chartres, peut-être plus qu’aucune autre, est, comme la Bible qu’elle exprime, un grand livre fermé pour le profane, un livre d'images que chacun peut lire à sa façon. Mais elle est surtout un signe d’intelligence fait par-delà les siècles. Les spéculations les plus farfelues sont nées de ce bel édifice. Il n'en demeure pas moins vrai que le symbolisme y est omniprésent et que nous ne pouvons pas l'ignorer.
Comme tous les livres, il y a plusieurs lectures possibles, soit avec un regard «profane», loin de s'imaginer ce que représente toutes ces sculptures, gravures, vitraux ou peintures, soit avec un certain regard «d'initié» qui nous révèle ce que les imagiers ont voulu exprimer, qui nous amène à lire autrement le message de ce magnifique vaisseau de pierre.
Ce monument où l'iconographique chrétienne rayonne de toutes parts est une véritable Bible ouverte pour qui sait la lire et pour qui connaît la Bible.
Comme tout signe, le symbole établit un rapport entre une forme quelconque et un référent. Le symbole oblige à voir différentes perspectives et ces différents aspects permettent de s'approcher de la solution unique. Mais encore faut-il savoir l'interpréter, ce que les uns voient ici, d’autres y liront davantage.
Prenons un exemple à l’intérieur de la cathédrale : sur le vitrail de la Passion Typologique (la Rédemption), le 6e du bas-côté nord en entrant par le portail ouest, offert par les maréchaux ferrants et les forgerons, figure un pélican se crevant le flanc (4e élément en partant du bas). Là où nous voyons un pélican se mutiler pour nourrir ses petits, symbole de l'amour parental, l'iconographie chrétienne en a fait le symbole du Christ versant son sang pour sauver l'humanité, expliquant du fait le nombre d'oisillons qui sont trois, symbolisant le corps, l'âme et l'esprit.
De tous temps le symbole a été usité pour la transmission des messages et ce en toutes civilisations, que ce soit avec les gravures paléolithiques, les hiéroglyphes égyptiens, voir les idéogrammes chinois. Le symbole a toujours parlé à l'homme et l'homme a toujours interprété le symbole. Il est du reste intéressant de noter qu'une fois que l'on possède la clé, la lecture des cathédrales est identique.
En effet, le symbole étant la clé, il suffit de savoir interpréter pour que s'ouvre à vous dans une limpide compréhension le message des constructeurs. Comme le souligne les alchimistes dans leur devise :
« Lege, lege, relege, ora, labora et invenies » :
« Lis, lis, relis, prie, travaille et tu trouveras ».
Le plan de la cathédrale, en forme de croix, ne serait-il pas une allusion au Christ crucifié ?
L'orientation du bâtiment est importante pour le chrétien car elle matérialise la marche des ténèbres vers la lumière et trouve un sens dans les représentations figurées aux portails et vitraux de la cathédrale.
Le labyrinthe de la nef est à la fois un raccourci du pèlerinage à Jérusalem des croisés et du long parcours du pécheur vers le salut.
Les nombres et leur symbolisme se révèlent à nous en maints endroits de la cathédrale. Les nombres trois, quatre, sept, dix, douze, quatorze et vingt-quatre y sont représentés.
Ainsi, le nombre sept, considéré comme sacré, a présidé à l'organisation du plan de la cathédrale : c’est ainsi qu’on dénombre sept chapelles absidiales rayonnantes, sept travées de la nef, sept travées du transept dans sa totalité… A l’époque, on parlait des sept planètes du Cosmos et la cathédrale était considérée comme la projection sur terre de ce qui est dans le ciel.
Le nombre sept, correspondant également au nombre de statues des porches latéraux du Portail royal, évoque le nombre sacré ainsi que celui des dons de l’Esprit Saint, de même que la somme de trois et de quatre qui évoquent des arts libéraux également au nombre de sept si l’on réunit le « trivium » et le « quadrivium ».
Pour les chrétiens, sept est un nombre sacré puisque le monde a été créé en sept jours. C’est surtout celui de la Vierge, la « pietas », relié aux sept dons du Saint-Esprit visibles au vitrail de l’Arbre de Jessé.
Au porche central du Portail royal, les deux groupes de cinq statues évoquent le nombre dix, symbole de la perfection chez les Grecs et spécialement pour Pythagore dont les théories étaient étudiées dans les écoles autour des cathédrales comme à Chartres.
Dix est la somme de 1 + 2 + 3 + 4 connu des anciens sous le nom de « Tetrakthys ».
Selon Pythagore, dix signifie la perfection. C’est le nombre parfait, représenté en bonne place dans le tympan de la Porte de la Vierge au Portail royal. Est-ce pour cela que le nombre de statues aux ébrasements du portail central était de dix ?
Le roi David a été représenté à la quatorzième place en partant de l’extérieur gauche de la façade occidentale. Rappelons que dans l’Antiquité, les lettres servaient aussi de chiffres et qu’en Hébreu il n’y a pas de voyelles. Dès lors, si l’on veut bien considérer la valeur des lettres servant à écrire le nom de David, qui est composé de Daleth, Vau et Daleth, et sachant que Daleth correspond à quatre et Vau à six, le nom de David correspond alors au nombre quatorze. Quatorze est le nombre messianique, comme le rappelle le premier chapitre l’Evangile de saint Matthieu : il s’agit de la « gématrie » du nom de David. Le nombre de générations dans la généalogie d’Abraham à David est de quarante-deux. Jésus-Christ y est dit fils de David, à la fin de trois séries de quatorze générations.
Le premier chapitre de Matthieu est sa profession de foi. Le Jésus dont il va rapporter l’histoire est, pour lui, « le parfait David », ce que symbolise le « 3 fois 14 » des 42 générations. Quatorze, somme de dix et quatre est également le double de sept.
Chartres est la seule cathédrale qui possède un Portail royal. Ce qualificatif lui a été attribué parce que les créatures qui y règnent, participent de la royauté du Christ. Tout y parle de dix (la perfection) et de quatorze (la royauté de David). Il ne faut donc pas être surpris de trouver sous l’Eternel, qui est aussi Christ du jugement, quatorze « apôtres ».
Deux témoins de l’Apocalypse encadrent les douze apôtres. Le fait que ces deux personnages aient été représentés en retrait par rapport aux douze autres s’explique aussi par le symbolisme du nombre sept. Douze, résultat du produit de trois par quatre, est en effet le nombre des apôtres.
Les nombres quatorze et dix sur lesquels se fonde tout le symbolisme du Portail royal, sont signés de leurs auteurs : au-dessus de saint Matthieu figure précisément Pythagore.
Le nombre vingt-quatre représente, dans le texte sacré, les 24 divisions de l’espace et du temps selon la cosmologie babylonienne, qui est à l’origine de nos 24 heures. Vingt-quatre, c’est aussi deux fois douze, est représenté par les vieillards de l’Apocalypse. Les vingt-quatre vieillards, couronnés et musiciens, sont l’harmonie des sphères de Pythagore : ils représentent ici la symphonie de l’univers, « la ronde sonore des heures ».
Aux porches du Portail royal, cinq statues ont disparu. Elles ont été remplacées par des fûts de colonnes. Si nous dénombrons ces statues, en tenant justement compte de celles qui ont disparu, et si nous prenons en compte les trois statues qui se trouvent tout à fait à l’extérieur, de chaque côté, nous obtenons alors la disposition suivante :
3 4 5 5 4 3
7 10 7
ce qui nous met à nouveau en présence des nombres sept, dix et vingt-quatre.
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