• L’enceinte de Bruxelles datant du 13ème siècle

    Sommaire

    Premier article (3. 1.) : lien URL

    Bruxelles au 11ème siècle

    Plan de Bruxelles à la fin du 10ème siècle

    La route marchande à travers Bruxelles

    D’autres voies dans la ville

    Les habitations

     

    Deuxième article (3. 2.) : lien URL

    L’enceinte de Bruxelles à partir du 12ème siècle

    Epoque d’édification

    Aspects des premiers remparts

    La muraille

    Les tours

    Les portes

    Plan de Bruxelles en 1572

    Les guichets

     

    Troisième article (3. 3.) : lien URL

    Le tracé de l’enceinte au 13ème siècle

    Quelques problèmes liés à la construction de l’enceinte

    Utilité et évolution de l’enceinte

    Des restaurations et des vestiges

     

    Quatrième article (3. 4.) : lien URL

    Ce qui subsiste à l’heure actuelle

    A. Des restaurations fantaisistes

    1. La Tour Noire, place Sainte-Catherine

                         2. Rue du Midi n° 110

                         3. Les vestiges à l’hôtel S.A.S.

                         4. Le vestige de l’hôtel Royal Embassy

     

    Cinquième article (3. 5.) : lien URL

    Ce qui subsiste à l’heure actuelle

    A. Des restaurations fantaisistes (suite 1)

                           5. La Tour d’angle dite « Tour Anneessens »

     

    Sixième article (3. 6.) : lien URL

    Ce qui subsiste à l’heure actuelle

    A. Des restaurations fantaisistes (suite 2)

                          6. La tour et le rempart longeant la rue de Villers

     

    Septième article (3. 7.) : lien URL

    B. Des vestiges plus authentiques mais souvent bien cachés !

    1. Dans le Palais des Beaux-Arts, rue Ravenstein, 23 et rue Royale, 10 et 16

    2. Dans les souterrains de la place Royale

    3. Rue Bréderode

    4. Dans l’ancien parking privé de la Banque Nationale

     

    Huitième article (3. 8.) : lien URL

    B. Des vestiges plus authentiques mais souvent bien cachés ! (suite 1.)

    5. Dans la salle à manger de l’hôtel Atlas

    6. Rue des Chartreux n° 42

    7. Rue Van Artevelde n° 44 – 45

    8. Rue Sainte-Catherine n° 42

     

    Neuvième article (3. 9.) : lien URL

    B. Des vestiges plus authentiques mais souvent bien cachés ! (suite 2.)

    9. Rue du Bois Sauvage n° 14 – 15

    10. Dans la salle de concerts du « Hungarian Culture Brussels »

    11. Boulevard de l’Empereur

     

    Dixième article (3. 10) : lien URL

    Synthèse de cette étude

    Plan final établi par R. Dons d’après Guillaume Des Marez

    Bibliographie

    Classements durant le troisième trimestre 2002

     

    A. B.

     


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  • La vallée de la Senne

    Sommaire

    La Senne

    Le paysage de Bruxelles avant le 10ème siècle

    1. Le relief du sol
    2. La rivière
    3. La Senne dans la future ville
    4. Les affluents

    Le port primitif de Bruxelles

    Les inondations

    La Senne au 19ème siècle vue

    L’école des vétérinaires

    Le rôle des écluses lors des inondations

    L'assainissement de la Senne

    Le voutement de la Senne

    La « Grande Écluse »

    La « Grande » et la « Petite Écluse »

    La Senne aujourd’hui

    Des sites d'aujourd’hui à l’emplacement de la Senne d’hier

    Pour conclure

    Perspective d’avenir

    Bibliographie

    * * *

    La Senne

    Il y a plus de 1000 ans, la Senne était une rivière gracieuse, formant de nombreux méandres et îlots, très poissonneuse et où fleurissait abondamment l’iris jaune, symbole de la Région de Bruxelles Capitale.

    Durant plusieurs siècles, elle a constitué pour toute cette région une artère vitale, source de développement et de progrès… Mais aujourd’hui, tous semblent avoir oublié ce que cette rivière leur apporta. La Senne est-elle une rivière qui s'est perdue ?

    La Senne est une rivière typiquement « belge » qui s’écoule sur près de 100 km au travers des trois régions. Elle fait partie du bassin oriental de l’Escaut. 

    Le paysage de Bruxelles avant le 10ème siècle

    1. Le relief du sol

    Trois formes de relief se sont imposées dans le développement de la ville : une très large plaine alluviale au mauvais drainage naturel comblée aujourd'hui par dix à vingt mètres d'alluvions, un versant raide et un plateau.

    * La vallée de la Senne

    Le paysage de la région bruxelloise, à l'aube du 10ème siècle, devait être des plus séduisants. C'était une succession de riantes collines qui s'alignaient à l'est et dont les pentes se couvraient de labours et de vignobles égayés de verdoyantes et riches prairies. A l'ouest, dans les basses étendues marécageuses de la rive gauche de la Senne, le sol peu accidenté était couvert de quelques petits bois.

    Là où se trouve le centre de Bruxelles actuel, la Senne traversait une plaine d'alluvions large d'environ un kilomètre qui s'élargissait en formant plusieurs îles.

    L'ondulation du terrain, encore très marquée de nos jours, présente de nombreuses collines isolées ou des éperons de sable comme le Coudenberg et le Treurenberg sur le territoire de Bruxelles-ville, l’altitude 100 à Forest ou le Groeselenberg à Uccle...

    Le versant est interrompu par des replats où furent érigées notamment la cathédrale Saint-Michel ainsi que l'église Notre-Dame-du-Sablon et où fut tracée la rue Haute qui bénéficiait ainsi d'une pente minimum.

    Le plateau s'allonge du sud au nord entre les vallées de la Senne et du Maelbeek et se termine en un promontoire dominant le confluent de ces deux rivières au-delà de l'église Sainte-Marie à Schaerbeek.

    2. La rivière

    Pour se donner une idée de ce qu’était la Senne autrefois, il faut sortir de l’agglomération actuelle et se rendre, par exemple, à Drogenbos ou à Beersel, en amont de Bruxelles où elle coule encore à ciel ouvert. Ses eaux sont déjà fortement polluées par les usines et les égouts. Une vase noirâtre et nauséabonde se dépose en été dans le lit de la rivière et est à découvert lorsque les eaux sont basses. En aval de Bruxelles, en direction de Vilvorde, la Senne est également visible de la chaussée de Vilvorde.

    La Senne s’appelait autrefois la Braine ou Brania, comme en témoignent des localités du Brabant wallon telles que Wauthier-Braine, Braine l’Alleud, Braine-le-Comte. Avant d'arriver à Bruxelles, la Senne se divisait en deux bras sur la commune d'Anderlecht : le bras principal entrait dans la ville – le Pentagone actuel –  par la Grande Écluse située le long de l'actuel boulevard Poincaré.

    Le bras secondaire, appelé Senne de Ransfort, pénétrait dans la ville par la Petite Écluse près de la place de Ninove.

    La Senne serpentait à ciel ouvert dans le centre de la ville. Au fur et à mesure que l’industrie et l’habitat se sont développés, la Senne et tout le bas de la ville ont souffert sans cesse davantage de la pollution. Les quartiers le long de la rivière autrefois pittoresques sont devenus bien misérables. La population devait se ravitailler en eau aux fontaines publiques tandis que la Senne servait d’égout à ciel ouvert. La rivière coulait entre des façades lépreuses, se faufilait sous les annexes en bois…

    3. La Senne dans la future ville

    Au 5ème siècle, sur les îlots de la rivière – et notamment l’îlot Saint-Géry – et sur des terres marécageuses les Francs fondèrent « Bruocsella » (que certains historiens ont traduit par « la maison dans le marais »), un village agricole qui devint plus tard Bruxelles. 

    Avec René Dons, examinons le cours de la Senne et de ses principaux affluents à travers la future ville de Bruxelles.

    Le bras principal de la Senne correspondait grosso modo au tracé des boulevards Lemonnier et Anspach et contournait trois îles dont les deux plus importantes étaient une petite île triangulaire appelée « Petite Île » ou « Île d'Overmolen », puis une île plus grande ou «Grande Île» qui devint « Île Saint-Géry », enfin, au nord, une nouvelle île triangulaire.

    La Senne de Ransfort coulait en droite ligne jusqu'à l'actuelle place du Jardin-aux-Fleurs et rejoignait le bras principal de la Senne autour de l’Île Saint-Géry, là où se trouve aujourd’hui le carrefour des rues Van Artevelde et Van Praet.

    4. Les affluents

    Le versant raide de la rive droite de la Senne était profondément découpé par des affluents qui devaient littéralement dévaler vers la rivière.

    • Le ROLLEBEEK (Savelbeke, Santbeek ou ruisseau du Sablon), prenait sa source au Petit Sablon, dévalait la pente en traversant le Grand Sablon, suivait les rues actuelles de Rollebeek, des Alexiens, des Bogards et se jetait dans la Senne à hauteur de la place Fontainas.
    • Le SMAELBEEK, issu du RUYSBROECK, suivait la rue actuelle de Ruysbroeck, traversait la place de la Justice, suivait approximativement les rues de l'Hôpital, Duquesnoy, de l'Homme Chrétien, du Marché-aux-Fromages, des Brasseurs, de l'Amigo, des Pierres (Plattesteen) pour rejoindre la Senne non loin de la Bourse
    • Le COPERBEEK (ou ruisseau au Cuivre) prenait sa source aux abords de l'ancienne porte du Coudenberg située rue de Namur, à hauteur de la rue Bréderode. Après la traversée du parc du Palais royal, il coulait au fond d'un profond vallon remblayé lors des aménagements de la place des Palais, passait par la rue des Sols, le quartier actuel de la gare Centrale (ancien quartier Isabelle et Terarken), longeait le Marché-aux-Herbes (où il prenait le nom de SPIEGELBEEK ou ruisseau du Miroir) puis le Marché-aux-Poulets. Il contournait, par l'arrière, l'église Saint-Nicolas où il devenait le SCHOENBEEK ou ruisseau aux souliers car, au Moyen Age, les cordonniers et les savetiers y avaient leurs échoppes. Enfin, il changeait une nouvelle fois de nom et devenait le VUILBEEK ou Sale ruisseau avant de rejoindre la Senne.

    Le ruisseau de la HAMEDE quittait le quartier dit « Orsendael », suivait le tracé de la rue des Sables, drainait le quartier dit «Warmoesbroek» le long de la rue du Marais, suivait le tracé de la rue des Boiteux et de la rue d'Argent avant de se jeter dans la Senne à hauteur du Centre Monnaie. Ce ruisseau alimentait le fossé de l’enceinte à l'emplacement actuel de la rue du Fossé-aux-Loups.

     

    * La vallée de la Senne

    La Senne et ses affluents

    Le site primitif de Bruxelles

    d’après R. Dons

     

    • Un affluent de la Senne a joué plus tard un rôle dans le tracé de la «deuxième» enceinte : il s'agit du RAHLENBEEK qui coulait des hauteurs de l'ancien Observatoire, longeait le boulevard du Jardin Botanique dont les étangs du Jardin Botanique actuel rappellent le souvenir.

    Sur le plan de Jacques de Deventer, dressé de 1550 à 1554, il est possible d’observer distinctement les bras de la Senne. La rivière venant du sud-ouest pénétrait dans la ville en passant sous les remparts. Elle se ramifiait ensuite dans la ville et y forme plusieurs îles.

    L’eau de la rivière alimentait les douves de la première enceinte, également visible sur ce plan. Plus tard, elle emplissait aussi les larges fossés qui protégeaient la deuxième enceinte de la ville.

    Vers 1858 les remparts de la deuxième enceinte ont disparu tandis que les douves ont été comblées mais que la Senne coulait encore à ciel ouvert. A l’intérieur de la ville, son cours n’avait pas changé : la rivière serpentait entre les pâtés de maisons. Depuis longtemps elle avait cessé d’être navigable.

    La claire rivière de jadis s’était peu à peu transformée en égout, particulièrement malodorant, surtout en été par les fortes chaleurs, et capricieux par les inondations provoquées par les fortes pluies d’orage estivales ou les interminables averses hivernales. Combien de caves inondées, de rues sous eau et de rats qui couraient partout !

    Le port primitif de Bruxelles

    A la pointe septentrionale de la petite ile située au nord du « castrum » – premier domaine seigneurial fortifié de « Bruocsella » – se trouvaient le port primitif de Bruxelles et un pont permettant le chargement des barques. La route marchande, qui reliait le Rhin à la Flandre, franchissait la Senne sur ce pont situé entre l’actuel Marché aux Poulets et la rue sainte Catherine.

    Le Pont des Bateaux (« pons navium » ou « scipbrug ») appelé ensuite « Pont des Poissonniers » marquait le terme de la navigation sur la Senne. Il existait déjà au 11e siècle. Ce pont à deux arches servait au transbordement des produits agricoles.

    Au-delà du pont, aujourd’hui à l’emplacement de la rue des Poissonniers, se trouvait le Quai des Poissonniers, un terrain asséché dont les eaux servaient jadis à la défense du « castrum ». Ce quai conduisait à un deuxième pont, le pont de la Carpe, qui donnait accès à la grande île Saint-Géry.

    Henri Pirenne a démontré que la formation des villes au Moyen Age était essentiellement due à l’œuvre des marchands qui pratiquaient le commerce en des endroits favorables. Ainsi, si ce sont des préoccupations militaires qui ont fait choisir l'emplacement de l'Ile Saint-Géry pour l'édification du « castrum », la naissance de la cité est due également à la profondeur des eaux de la Senne. La profondeur de la rivière était plus importante en aval de l’île qu'en amont où des ensablements causés par l'existence de plusieurs bras se produisaient régulièrement. C'est donc sur la pointe nord de l’Île Saint-Géry que fut aménagé le premier port de Bruxelles.

    En contact avec le Rupel, l'Escaut, le Rhin inférieur, en rapport avec Londres et Cologne, les bateliers qui naviguaient sur la rivière trouvaient au pied « du castrum » une défense bien organisée.

    Bruxelles est très vite apparue comme un portus, c'est-à-dire un endroit où les marchandises devaient être débarquées puisque la Senne y cessait d'être navigable.

    Une place carrée, appelée le « Werf », servait de débarcadère.

    Dès le 15ème siècle, la navigation sur la Senne présenta de très grandes difficultés et l’on songea à établir une voie directe entre Bruxelles et le Rupel.

    Pendant des siècles, le « Werf » conserva sa destination de débarcadère et ne la perdit que le jour où, au 16ème siècle, le creusement du Canal de Willebroeck fit cesser la navigation sur la Senne.

    Les inondations

    De très nombreux moulins à eau, étangs, barrages, installés sur la Senne et ses affluents, ont permis le développement économique, urbanistique et social de Bruxelles. 

    La Senne formait à cette époque deux bras principaux dans Bruxelles, se séparant au hameau d'Aa (Anderlecht), ainsi que de nombreux embranchements secondaires, naturels ou artificiels (notamment la « petite Senne » et divers fossés des fortifications).

    Cette situation a radicalement changé au 19ème siècle : les crues de la Senne occasionnaient de nombreux dégâts dans Bruxelles, d’autant qu’on laissait de moins en moins de place à la rivière pour épandre ses sautes d’humeur redoutables et redoutées. 

    De plus, les quantités croissantes d’eaux usées (voire d’immondices) rejetées par les

    habitations et plus tard par l'industrie (notamment les blanchisseries, teintureries, vanneries, brasseries, tanneries…), transformèrent la rivière en égout à ciel ouvert, à l'origine d'épidémies sporadiques. 

    Les odeurs nauséabondes qui s'en dégageaient sont particulièrement marquées lors des basses-eaux. 

    Depuis des siècles, la Senne était la source de perpétuelles inondations. Déjà en 1644, un ingénieur avait proposé de fermer les écluses de la ville et de faire passer les eaux en dehors, ce qui ne devait offrir aucune difficulté car les remparts de Bruxelles formaient une grande digue.

    Les inondations de 1839 furent à ce point calamiteuses que Nothomb, ministre des travaux publics, créa une commission d’enquête chargée de rechercher et de dénoncer les causes essentielles des inondations et d’y trouver remède.

    La commission déposa rapidement ses conclusions : il fallait curer de toute urgence le lit de la dérivation de la Senne qui passait par Molenbeek. Cela permettrait un meilleur écoulement des eaux excédentaires.

    Le rapport, pourtant très détaillé, restait néanmoins muet sur une des causes principales des inondations dont les faubouriens surtout faisaient les frais : la fermeture des vannes des écluses d’entrée lors des grandes crues !

    En fermant les vannes, la ville réglait, à sa guise, la quantité d’eau qu’elle autorisait à traverser le pentagone. Le surplus qui s’écoulait dans les caves des Molenbeekois ou dans les prairies des Anderlechtois ne l’intéressait pas le moins du monde. C’est pourquoi rien ne se fit ! Après l’enquête de 1839, des travaux auraient dû être entrepris par le gouvernement, par la province, par la Ville et par les propriétaires d’usines. Ces travaux ne furent pas exécutés. Les conséquences de cette inaction furent particulièrement tragiques. En effet, quelques années plus tard, en 1850, une nouvelle catastrophe, plus grande encore que celle de 1839, s’abattit sur les riverains de la Senne.

    Le 15 août, à l’occasion d’un violent orage, les eaux de la Senne se mirent à grossir dans un très bref laps de temps, pour atteindre, en peu d’heures, leur niveau le plus élevé. Bientôt la rivière déborda de toutes parts et de nombreuses prairies et terres labourables d’Anderlecht furent transformées en de vastes étendues d’eau. Toutes les fabriques et usines sises le long de la rivière furent inondées et offraient un spectacle désolant.

    A Molenbeek-Saint-Jean, la situation n’était guère plus brillante : c’est un des quartiers pauvres qui fut le plus touché. Quant aux Bruxellois, ils ne furent pas épargnés, eux non plus.

    La commission d’enquête de 1839 avait reconnu la nécessité d’un déversoir dans le canal de Charleroi mais des oppositions acharnées s’élevèrent contre cette solution contraire tant aux intérêts de la concession du canal et qu’à ceux de la Ville.

    Dans la ville, il existait des passages tellement étroits qu’ils constituaient une cause perpétuelle d’inondation.

    La Senne au 19ème siècle vue

    Camille Lemonnier nous a laissé une description pittoresque de la Senne et du milieu géographique et humain qu’elle traverse :

    « Un délabrement de masures vermoulues, fleuries de mousses veloutées, avec des giroflées sauvages dans les crevasses, mettait tout le long de la Senne ses pans de murs déjetés, surchargés de logettes en bois pendant en surplomb sur les eaux terreuses, et hérissés de déversoirs en pierre par où dégoulinaient les lessives des ménages. Tout un lacis d’impasses s’entrecroisait dans une demi-obscurité chaude, emplie de grises fumées tourbillonnantes que le soleil lamait d’or…

    * La vallée de la Senne

    La Senne au Borgval

    La rivière serpentait à travers cette agglomération de petites maisons tassées, en bonne ouvrière qui prend sa part de travail général et se multiplie pour être largement serviable : ses bras s’étendaient partout, plongeaient au cœur de cette existence besogneuse, avec des amas de grosses écumes jaunâtres aux barrages, des remous de vapeurs bouillantes le long des usines, des traînements lents de flaques huileuses sur tout son parcours.

    * La vallée de la Senne

    La Senne depuis le Pont de la Carpe

    Elle avait fini par être le dépotoir, non seulement des industries groupées sur ses bords, mais de toutes les maisons riveraines : il n’était pas rare de voir un ventre ballonné de chien flotter, pêle-mêle avec des mise-bas et des détritus ménagers, à la dérive de ses eaux grasses et lourdes.

    * La vallée de la Senne

    La Senne près des Riches Claires

    En automne, des brouillards montaient de ses vases, assombrissant l’air de crêtes opaques à travers lesquels les réverbères, le soir, avaient l’air d’yeux rouges larmoyants ; et ses pestilences saturaient l’atmosphère d’une odeur particulière, où se confondaient des relents de caoutchouc, de cambouis et de vieille suie mouillée.

    C’était une des curiosités du vieux Bruxelles : on flânait sur des ponts d’où s’entrevoyait, par échappées brusques, la perspective des toits tailladés en dents de scie et aiguisés en gueule de brochet, avec des ressemblances vagues de canaux brugeois ; la nuit, les fenêtres braséaient sur le noir des fonds, reflétées en un fourmillement de paillettes ignées dans les moires sombres du flot ; et celui-ci, en se brisant aux arches, avait un bruissement doux, continu, auquel ne résistaient pas les douleurs solitaires…

    La bonasse rivière avait pourtant ses moments d’humeur ; au temps des crues, elle pénétrait dans les sous-sols, montait l’escalier des caves, souvent même envahissait les rez-de-chaussée. Il ne fallait qu’une nuit pour opérer la transformation des bas quartiers en un vaste lac, duquel émergeaient piteusement des tronçons de maisons, et dont les remous, parfois violents, prenaient, au détour des rues, des airs de marins que contemplaient, résignés, les bourgeois en bonnet de coton, surpris au saut du lit par l’inondation…

    Le bourbeux et jaunâtre cours d’eau établissait en effet une démarcation parmi les gens de la ville ; une race à part, nullement comparable à celle des hauts quartiers, s’était petit à petit formée dans ses atmosphères grasses du houblon, perpétuant la tradition de ce caractère étalé et rond, primesautier, prompt à l’injure, dépensier, mais au fond bon enfant, que l’histoire prête aux « kiekefretters » ou mangeurs de poulets, sobriquet qu’a valu aux bruxellois leur amour des mangers succulents.

    C’est dans le voisinage des brasseries et des moulins, entre la place Sainte-Catherine et la rue d’Anderlecht, la place de l’Hôtel de Ville et la place Saint-Géry, que florissait le vieux bourgeois bruxellois ; rarement il franchissait les limites de la circonscription où il était né, où il avait pris femme, où il s’était enrichi ; toute son existence se renfermait entre le cabaret, sa boutique et l’église ».

    * La vallée de la Senne

    La Senne rue Saint Géry

    Le clair et riant ruisseau de jadis était devenu un cours d’eau très pollué, par les usines et les manufactures, pollué aussi par les habitants qui n’avaient pas encore de « tout à l’égout » et qui se débarrassaient de leurs ordures et des eaux usées grâce à la rivière.

    Par les chaudes journées d’été, la Senne empuantissait tout le bas de la ville. Les rats y pullulaient : un vrai paradis pour ces rongeurs mais aussi quels dangers d’épidémies !

    L’école des vétérinaires

    A l’origine, l’Ecole vétérinaire portait le nom de « Ecole d’économie rurale et vétérinaire ». Il indique bien que les fondateurs voulaient former à la fois des vétérinaires et des agronomes, mais on ne trouve guère beaucoup d’élèves agronomes dans le registre matricule conservé dans les archives.

    Avant qu’elle ne s’installe, au début de ce siècle, dans les nouveaux quartiers urbanisés de Cureghem, l’Ecole vétérinaire jouxtait le bâtiment de la Grande Écluse. Les terrains sur lesquels elle s’installa dès la fin de 1836 avaient été achetés aux sieurs Verhulst et Lion. D’autres parcelles, acquises plus tard, permirent à l’école de s’ouvrir largement sur le boulevard d’Anderlecht.

    L’emplacement de l’école était exposé aux inondations de la Senne et les cours ont été plusieurs fois suspendus pour permettre l’assainissement des locaux !

    L’aménagement du lit de la Senne, à partir de 1867, remédia à cet inconvénient.

    Dans une publication de l’histoire de l’Ecole vétérinaire, on peut lire qu’au numéro 77 du boulevard Poincaré se trouvait  « une maison avec trois fenêtres flanquées de deux portes cochères » et qu’il s’agissait de « la maison de l’éclusier de la Senne ».

    * La vallée de la Senne

    La Grande Écluse

    Le rôle des écluses lors des inondations

    A partir du hameau d’Aa, à Anderlecht, la Senne se divisait en deux bras : le bras oriental pénétrait dans la ville par la Grande Écluse, située près de l’ancienne Ecole vétérinaire, c’est-à-dire le long de l’actuel boulevard Poincaré ; l’autre, le bras occidental se dirige vers la Petite Écluse, située près de l’ancien abattoir, c’est-à-dire à proximité de la porte de Ninove.

    Ces deux bras étaient reliés entre eux par la « coupure » ou Sennette ou « Petite Senne », une espèce de canal réalisé jadis pour recevoir, lors des grandes crues, les eaux surabondantes et les conduire, au-delà de la chaussée de Flandre, par l’extérieur de Bruxelles, à environ cinq kilomètres en aval de la ville. Il s’agissait donc là d’une importante mesure de sécurité.

    En outre, lors des crues, le trop-plein d’eau, non absorbé par les écluses ou par la dérivation, pouvait encore s’introduire dans les fossés de la ville et se jeter dans le canal de Willebroeck.

    La principale cause des inondations du siècle dernier réside dans le fait que lors des grandes crues, l’administration de la Ville de Bruxelles fermait sans vergogne les vannes d’entrée à la Grande et à la Petite Écluse, n’admettant de la sorte en ville qu’une quantité d’eau qui ne pouvait lui être préjudiciable mais qui provoquait par la même occasion la mise sous eau des prairies en amont de Bruxelles et, ce qui est plus grave encore, des faubourgs de Cureghem et de Molenbeek-Saint-Jean.

    * La vallée de la Senne                                               * La vallée de la Senne

                                                 La Petite Écluse                                                     La Grande Écluse

    L'assainissement de la Senne

    Vers 1850, les autorités commencèrent une lutte contre les nuisances. En 1861, une commission technique se mit en place sous les ordres du ministre Anspach et étudia plusieurs solutions. Ces concertations devaient déboucher en 1865 sur l'approbation des premiers projets d'assainissement, c'est-à-dire :

    • le voûtement de la Senne dans sa partie agglomérée avec la création d'un grand boulevard central ;
    • la séparation des eaux de la rivière des eaux d'égout, car ces dernières devaient être conduites vers une station d'épuration à fabriquer à Buda ; et en 1867 du commencement de la construction du premier voûtement de la Senne, constitué de deux grands puits centraux de 6,10 mètres de haut sur 4,50 mètres de large ;
    • deux égouts latéraux reprenant chacun les eaux usées d'une rive du cours d'eau.

    En 1871, ces projets achevés se révélèrent, par suite de l'urbanisation constante, rapidement faibles, particulièrement en dehors des anciens remparts.

    Vers 1880, la Province de Brabant prit la décision de réunir une nouvelle fois une commission technique. A la suite de ces discussions, l'idée dite du « second axe hydraulique » parallèle à la Senne et pouvant résorber le surplus des eaux de celle-ci se mit en place. Le canal proche de là constituait en toute évidence une solution possible pour les eaux de crues de la Senne tandis que celle - ci serait détournée dans le centre.

    On créa des déversoirs vers le canal à hauteur de Lembeek et d'Anderlecht pour écrêter les crues mais cette intervention n'apporta pas de solution aux problèmes locaux des inondations.

    Le voutement de la Senne

    La création des boulevards du centre fut le point de départ des embellissements du bas de la ville. La construction de la Bourse, des Halles et de la gare du Midi s’y rattachent. Dès 1864, une commission d’ingénieurs fut nommée afin d’étudier la question du voûtement de la Senne et de l’assainissement des quartiers qui l’environnaient.

    Le voûtement de la Senne est encore aujourd’hui considéré comme l’une des plus grandes opérations de chirurgie que notre ville ait eu à subir. Elle n’a eu d’équivalent que la création de la jonction ferroviaire Nord – Midi.

    La Senne était déjà sortie de son lit en 1716, en 1819, en 1839 et en 1850. Les épidémies qui se déclaraient régulièrement dans les quartiers populeux environnants cette eau fétide scandalisaient même la bourgeoisie.

    La rivière, devenue au fil du temps un véritable égout à ciel ouvert, charriait toutes sortes de détritus, ce qui provoqua plusieurs épidémies de choléra, notamment en 1832 et en 1849. La dernière, celle de 1866, qui se déclara dans une impasse du Vieux Marché – l’actuelle place Anneessens – fit plusieurs milliers de morts. Cette catastrophe signa l’arrêt de mort de la rivière qui allait être condamnée à disparaître sous terre.

    En cinq mois la maladie fit plus de 3250 victimes, au point que les fossoyeurs ne savaient plus où donner de la pioche ! Le bourgmestre Anspach et son administration firent face de leur mieux à cette situation. Des services auxiliaires de porteurs infirmiers furent organisés et le nombre de médecins des pauvres fut doublé.

    On prétend souvent que la Senne a été voûtée à cause de l’épidémie de choléra de 1866 mais il faut savoir que la décision du voûtement avait déjà été prise auparavant et cette dernière épidémie donna donc raison aux autorités. En effet, les travaux d’assainissement de la Senne furent décrétés par le Conseil communal le 28 octobre 1865. Le bourgmestre Jules Anspach, appuyé par le Roi Léopold II, confia les plans du voûtement à l’architecte Léon Suys qui avait déposé un projet finalement adopté après discussion et amendements.

    Les travaux commencèrent en 1868. C’est une société anglaise, la Belgian Works Company, qui se vit confier l’ouvrage. Mais lorsque les gros travaux du voûtement de la rivière furent terminés, la société liquida brusquement ses affaires en février 1871 et la poursuite des derniers travaux fut confiée à différents entrepreneurs, sous la direction de la Ville.

    Le nouveau boulevard du centre, qui recouvre en grande partie la rivière, fut inauguré le 30 novembre 1871. C’est le bourgmestre Jules Anspach qui ouvrit les vannes permettant ainsi à la rivière de déverser ses eaux dans le nouveau lit de pierre et de ciment. La Senne rejaillissait deux kilomètres plus loin, hors de la ville, dans les prairies de Laeken.

    * La vallée de la Senne

    Le voûtement de la Senne, qui s’est fait sur une longueur de 2200 mètres, fut le signal d’une transformation complète de cette partie de la ville. Il est vrai que ces événements dramatiques entraînèrent une prompte résolution d’un certain nombre de problèmes moins importants, alors en souffrance.

    La décision effective de l’exécution des travaux restera toujours liée à la personnalité dynamique de Jules Anspach. Figure exceptionnelle du libéralisme au 19ème siècle, Jules Anspach devint bourgmestre de Bruxelles à l’âge de 35 ans.

    Le voûtement entrepris dès 1867 fut un travail gigantesque. Il faut souligner la rapidité avec laquelle cette énorme table rase fut exécutée : le voûtement de la Senne ne dura que quatre ans, de 1867 à  1871. La fin des travaux, exécutés suivant les plans de l’architecte Léon Suys, fut célébrée le 30 novembre 1871.

    * La vallée de la Senne

    Cette entreprise comprenait également la rénovation des environs de la rue Grétry (prolongement de la rue elle-même jusqu’aux nouvelles Halles centrales ; prolongement de la rue de l’Évêque, de la rue du Fossé aux Loups et de la rue des Teinturiers). La rue des Fripiers fut élargie, et la rue des Foulons aménagée. Le quartier de la rue de Middeleer, aux environs de la Bourse, vit disparaître le Marché au Beurre et apparaître les rues Devaux, Orts, Dansaert, Maus et de la Bourse. Le quartier de la Vierge Noire disparut. La rue des Halles et la rue de la Vierge Noire furent aménagées. Les Halles centrales furent reliées à la place Sainte-Catherine par les rues Plateau et Melsens. La rue Van Artevelde était récente ; les rues de Laeken et des Poissonniers furent prolongées.

    * La vallée de la Senne

    Travaux de voûtement de la Senne

    derrière l’église  des Augustins

    La partie ostentatoire de la ville était, bien entendu, celle formée par les nouveaux boulevards du centre : les boulevards Emile Jacqmain et Adolphe Max, la place de Brouckère, les boulevards Jules Anspach et Maurice Lemonnier, où paradaient des édifices flambant neufs comme les Halles centrales et la Bourse, le Palais du Midi, l’hôtel Continental et l’hôtel Métropole.

    Mais les travaux de détournement de la Senne s’avérèrent encore plus importants. Ce détournement fut décidé en 1930 pour deux raisons : d’une part, on s’était rendu compte que c’était une erreur d’avoir fait le voûtement à travers la ville ; d’autre part,  le voûtement était insuffisant car aussi bien en aval qu’en amont, les désagréments subsistaient en période d’étiage. Ce même type d’erreur a été commis plus tard lors de la construction de la jonction ferroviaire Nord – Midi.

    Travaux de voûtement de la Senne

        * La vallée de la Senne

     

    A hauteur de la rue Middelleer

     

     

                                                            * La vallée de la Senne

     

                                Entre la rue des Pierres et la rue Teinturiers en juin 1870

    * La vallée de la Senne

                                                                                                                                                   Vue du Pont-Neuf vers la rue du Cirque

    La « Grande Écluse »

    Au 11ème siècle, la Vieille Ecluse, dite Spoy ou Spuy, comportait plusieurs portes et une écluse complétée par une seconde  au confluant des deux bras de la Senne au 14ème siècle.

    La Grande Écluse figurait déjà sur les plans initiaux de la Ville de Bruxelles au 16ème siècle.

    Lorsque le 24 février 1808, l'architecte Auguste Payen fit l'acquisition de la Grande Écluse pour la somme de 3400 francs, il détruisit l'édifice à l'exception du mécanisme des vannes et de la voûte du rez-de-chaussée qui sont conservés pour la reconstruction d'un nouveau bâtiment achevé en 1840.

    Malgré cette reconstruction et dans un projet d'agrandissement, on décida de redémolir l'édifice et de l'aligner au boulevard.

    Au 19e siècle, le côté extérieur du futur boulevard Poincaré présentait encore un paysage rural.  La Senne était bordée de champs et de grands arbres. Celle-ci entrait dans la ville. A cet endroit, la rivière pénétrait par une ancienne écluse, les habitants l'appelaient « la Grande Écluse » ou « Grote Spuy » (sise en plein boulevard du Midi actuel). Cette « Grande Écluse » donna son nom à une place, appelée de nos jours place de la Constitution. Cet endroit fut également nommé « Écluse des Blanchisseries », car les habitants y séchaient leur linge. A l'emplacement de celle-ci, il y a aujourd'hui un restaurant dénommé « La Grande Écluse ».

    La « Grande Écluse » comme « La Petite Écluse » servirent de magasins à poudre. La Senne passait aussi en viaduc au-dessus d'un fossé choisi par tant de désespérés.

    En 1858, un certain Jean-Baptiste, le gablier, surnommé Baptiste le gangster, le spécialiste de l'évasion, réussit à échapper aux gardiens en traversant la Senne à la nage...

    La « Grande » et la « Petite Écluse »

    Les travaux d’assainissement de la Senne débutèrent simultanément au boulevard Poincaré, devant la future Bourse et près du boulevard d’Anvers.

    * La vallée de la Senne

    Travaux de voûtement de la Senne

    à l’emplacement actuel de la Bourse

    A cette époque, tout le côté extérieur du futur boulevard Poincaré n’était que verdure, prés et grands arbres servant de décor à la rivière entrant dans la ville en direction du boulevard Lemonnier. Cette pénétration s’opérait grâce à une écluse antique qu’on appelait la « Grande Écluse » ou « Grote Spuy » située en plein boulevard du Midi actuel, « Grande Écluse » sur la Senne, encore connue comme « Écluse des Blanchisseries ». Elle servit longtemps de magasin à poudre par-dessus ses vannes.

                                                                                   * La vallée de la Senne     * La vallée de la Senne

    Travaux de voûtement de la Senne à proximité de la Grande Écluse

    Ce bâtiment, situé à la tête amont de ce qui était le voûtement de la Senne, abritait les vannes qui régulaient le cours de la rivière souterraine. Appelé vulgairement « Écluse du Midi » ou « Grande Écluse », il livrait passage au cours principal de la Senne tandis qu’au boulevard de l’Abattoir se trouvait la « Petite Écluse » par où s’engouffrait un bras secondaire, alimenté par les différentes coupures.

    Le bâtiment actuel de la « Grande Écluse » date de 1868, au début des travaux. Il est l’œuvre de Léon Suys et appartient au classicisme italien qui comporte des bossages et des enduits et des toitures qui se dérobent à la vue. Il fait partie du patrimoine communal. C’est la raison pour laquelle il fit l’objet d’une mesure de classement en 1984.

    Deux plaques commémoratives ont été encastrées dans la façade :

    La Senne a coulé

    pour la première fois

    sous ces voûtes

    le 30 novembre 1871.

     

    Les travaux d’assainissement

    ont été commencés

    le 17 septembre 1868.

    C’est ici l’antique point d’entrée de la Senne dans la ville de Bruxelles, le bras de Senne principale venant de Forest via le « Nieuwmolen » et la rue de France, bras canalisé sous la place Bara en ces mêmes années 1870.

    Chacune des deux arches qui sont visibles en sous-sol est munie d’une grande vanne en fer de 2 m 50 de hauteur, destinée à tenir la rivière en amont à un niveau suffisamment élevé pour introduire dans les collecteurs latéraux les eaux nécessaires au levage de ceux-ci et aussi pour pouvoir diriger par les bras extérieurs vers le canal de Willebroeck, qui exige très souvent cette alimentation supplémentaire.

    Le passage de l’eau retenue par les grandes vannes dans les collecteurs rive gauche et rive droite était contrôlé au moyen des petites vannes latérales dont on peut encore apercevoir aujourd’hui les crémaillères dans les coins de la pièce du rez-de-chaussée.

    En ce qui concerne les grandes vannes, chacune d’elles est suspendue par une tige à un piston qui se soulève par la pression de l’eau de la distribution, pression qui peut atteindre 6,5 atmosphères en ce point. La manœuvre des vannes se faisait ainsi très aisément, en tournant un robinet. Hélas, cette partie de la machinerie a disparu, mais les traces en sont restées visibles.

    Quelques mètres en amont des grandes vannes, existaient, dans l’ouverture des pertuis, des grilles qui servaient à retenir les objets flottant encombrants. Des grilles du même type existent encore aujourd’hui, à la tête amont du détournement de la Senne, derrière la rue des Vétérinaires.

    La Senne aujourd’hui

    La Senne a été voûtée et des égouts ont collecté les eaux usées du centre de la ville. Pour réaliser ces travaux gigantesques pour l’époque, il a fallu abattre des quartiers entiers, environ mille cent maisons, taudis, bicoques, masures branlantes et insalubres. Le pittoresque y a perdu ce que l’hygiène a gagné !

    Sitôt la rivière mise sous terre, les larges boulevards du centre ont été établis sur les tunnels du voûtement.

    * La vallée de la Senne

    Le boulevard Jacqmain

    Le détournement de la Senne, qui vient du square de l’Aviation où il rejoint le boulevard, se dirige ensuite vers la porte d’Anderlecht. Là, le voûtement reçoit le collecteur d’Anderlecht. La chaussée dut être élargie ; c’est pourquoi les deux petits pavillons de l’octroi qui gênaient furent déplacés plutôt que démolis. Chaque pierre fut soigneusement numérotée et la reconstruction des pavillons fut une réussite. C’est dans l’un d’eux que la Ville a installé le Musée des égouts.

    Lors des travaux, un souterrain qui reliait les deux petits bâtiments fut découvert. A chaque extrémité de ce souterrain fut mise au jour une magnifique arcade dont la lourde et impressionnante clef de voûte était ornée d’une tête de lion. L’une de ces deux pierres trône aujourd’hui sous le péristyle du Musée des égouts. Au même endroit, l’entrepreneur se heurta aux très solides fondations de l’ancienne porte d’Anderlecht.

    Le bâtiment de l’Écluse du Midi, qui a remplacé celui qui se trouvait là auparavant, ainsi que deux morceaux de pertuis de moins de 10 mètres de long nous rappellent le voûtement de 1867.

    Il reste deux tronçons de pertuis d’origine sous toute la longueur du boulevard Emile Jacqmain. Lors des travaux du métro, ils ont été fermés par un mur de masque, tant du côté de la place de Brouckère que du côté du boulevard d’Anvers. Ces vieux pertuis servent encore de bassin lors de crues exceptionnelles.

    Les maçonneries du voûtement devaient être bien solides puisque, un siècle plus tard, le pré-métro a pu y passer. Les voyageurs ne se doutent pas toujours qu’ils circulent dans un ancien cloaque !

     * La vallée de la Senne   

    Travaux de voûtement de la Senne au niveau de la rue des Pierres

    Le double pertuis près de l’actuelle place de la Bourse en 1868.

    A l’arrière plan, l’église des Augustins, future place de Brouckère.

     

    * La vallée de la Senne

    Le même endroit en 1975

    éventré par les travaux de construction du pré-métro au boulevard Anspach

     

    Des sites d'aujourd’hui à l’emplacement de la Senne d’hier

    La société concessionnaire du voûtement de la Senne, la « Belgian Public Works Company Limited » a confié au photographe Louis Ghémar la mission de photographier, le long de la vieille Senne, les coins pittoresques condamnés à disparaître. Louis Ghémar fit à cette occasion de la photographie documentaire de façon intensive ! Ses vues de la Senne sont de véritables chefs-d’œuvre qui ont pu figurer parmi les meilleures productions des photographes belges du 19ème siècle.

     * La vallée de la Senne                                   * La vallée de la Senne

    La Senne vue du Pont des Vanniers en 1865     Aujourd’hui : la tour Philips et le parking 58

     

     

    * La vallée de la Senne

     

     

     

     

    Une branche de la Senne formant la « Grande Ile »

    Les arches soutiennent les bâtisses d’une très ancienne auberge « In de beer » (« A l’Ours »)  

      * La vallée de la Senne

    Le même endroit aujourd’hui :

    rue Antoine Dansaert, quartier des restaurants asiatiques

    * La vallée de la Senne

     

     

     

     

     

     

    Vue du pont de la rue des Pierres avant 1868

    Les maisons du Borgval baignent dans la « Vuil Zinneke »

    * La vallée de la Senne

     

     

     

     

     

    Aujourd’hui : les maisons du Borgval

    rebâties entre 1870 et 1880

     

    Pour conclure

    Dès 1434, la Senne a été canalisée pour la navigation. Mais avec la création du canal de Bruxelles au Rupel en 1561, elle a perdu cette fonction. 

    Sous l'impulsion de Jules Anspach, Bourgmestre de Bruxelles, les premiers travaux de « voûtement » de la Senne ont été réalisés de 1867 à 1877. La Senne a été voûtée entre « la gare du Midi et la gare du Nord ». Les maisons et ruelles insalubres ont été détruites et des grands boulevards « à la Parisienne » ont été construits sur l'ancien lit de la rivière. Ce sont les actuels boulevards du Midi, Lemonnier et  Anspach, ainsi que tous les bâtiments qui les enserrent. 

    En dehors de cette zone, la Senne continue à couler à ciel ouvert, mais un réseau de collecteurs des eaux usées et l'élargissement de la Senne à l'aval de Bruxelles devraient être réalisés. 

    Entre 1931 et 1955 les travaux de détournement et le second voûtement de la Senne furent réalisés dans sa traversée de Bruxelles, lui donnant sa disposition actuelle. Elle est voûtée depuis la rue des Vétérinaires jusqu'au quai des Usines en suivant les boulevards Poincaré et de l'Abattoir, puis le canal de Charleroi à Bruxelles et l'Allée verte …

    Il y a peu encore, la Senne recevait les eaux usées de Bruxelles sans aucune épuration. La situation n’est guère plus brillante dans les autres régions, moins de 30% des eaux usées rejetées dans la Senne étant épurées en Région wallonne et à peine 2% en Région flamande. 

    Résultat après plus d’un siècle de cette politique : une rivière de plus en plus artificielle, pratiquement transformée en égout, qui représente l’une des principales sources de pollution de l’Escaut et de la Mer du Nord.

    Tant que la Senne a été une rivière claire, propre et navigable, la liaison entre Bruxelles et Anvers via Malines était commode.

    La pollution et l’envasement d’une part, la baisse des eaux d’une part, ont rendu nécessaire le creusement d’un canal reliant Bruxelles au Rupel et à l’Escaut : c’est le canal de Willebroek, creusé entre 1550 et 1561. Il fallut construire des écluses pour rattraper douze mètres de dénivellation et protéger les terres basses contre les marées qui se font sentir jusque dans le Rupel. Mais cela, c’est une autre histoire !

    De nos jours, la Senne coule sous le boulevard Industriel. C’est pour cela qu’il est difficile de la trouver : la rivière bruxelloise ne se dévoile pas au détour d’un chemin mais se débusque au cœur d’une zone industrielle où elle s’efforce de suivre son cours.

    Dans les odeurs de gaz d’échappement, le bruit assourdissant des voitures et l’horizon entravé par la masse des complexes industriels, une petite rue débouche sur un coin de nature. Entre les berges verdoyantes, un des rares morceaux de la Senne à ciel ouvert dans la capitale s’écoule paisiblement. L’eau est teintée de gris et il faut se pencher pour entendre son bruit, vite couvert par celui du train.

    La capitale est restée longtemps dépourvue de système d’épuration des eaux usées par plus d’un million de Bruxellois qui les rejettent directement dans la Senne.

    Si la Senne prend sa source en Wallonie, elle est de plus en plus polluée en arrivant à Bruxelles et coule donc en Flandre dans un piteux état. Au nord de Bruxelles, la rivière est d’ailleurs biologiquement morte. Elle est le plus polluant des affluents de l’Escaut et souille par la même occasion la mer du Nord.

    La Senne, méconnue des habitants de la capitale, a été occultée depuis longtemps. Son cours ne retrouvera sans doute pas une grande visibilité dans Bruxelles, mais elle demeure plus que jamais un axe de vie. L’amélioration de la qualité de ses eaux serait un immense bénéfice pour les trois régions qu’elle traverse, c’est-à-dire pour toute la Belgique.

    Perspective d’avenir

    Heureusement, depuis 2005 - 2006, la qualité des eaux a pu un peu s’améliorer. La première station d’épuration des eaux en Région de Bruxelles-Capitale, la station de Bruxelles-sud, est entrée en fonction à l’automne 2000. Elle traite un tiers des eaux usées de la capitale. 

    D’autres stations d’épuration devraient voir le jour dans les prochaines années dans les trois régions. Redonneront-elles à la rivière ces eaux claires d’antan?           

    Il ne faut pas oublier qu’une rivière est un milieu naturel. Il faudra donc aussi redonner un peu de place à la nature et, pourquoi pas, remettre la rivière à ciel ouvert. Peut-être pourrons-nous alors à nouveau profiter des plaisirs simples de la pêche ou des promenades le long de notre rivière? 

    En attendant, quelques petits coins de Senne ont conservé leur charme d’antan ou permettent de découvrir l’histoire.

    De la zone industrielle du quai d’Aa, depuis le boulevard International, au fond du zoning, en allant vers le pont de la voie ferrée, à un pont qui enjambe la Senne, la rivière a gardé ici un certain cachet avec ses méandres, ses berges « naturelles » envahies par la végétation. Mais l’eau de la Senne est déjà bien troublée par les rejets d’eaux usées de Flandre et de Wallonie. 

    En passant le pont de la voie ferrée, à un embranchement se trouve le déversoir d’orage d’Anderlecht. Cette partie du trajet est malheureusement aujourd’hui inaccessible ; le déversoir est seulement visible depuis l’écluse d’Anderlecht. Ces déversoirs permettent par temps de pluie de dévier les eaux de la Senne vers le canal, évitant ainsi que Bruxelles ne soit inondée ! En remontant un peu ce déversoir, on peut constater que les berges sont bien entretenues… En effet, il n’est pas rare d'y voir des moutons qui paissent paisiblement, l’une des dernières bergeries de Bruxelles y ayant élu domicile.

    De l’autre coté du boulevard International, à côté du bâtiment de la société « Viangros » se trouve le rejet de la station d’épuration de Bruxelles-Sud. La station elle-même est située boulevard Industriel, à cheval sur Anderlecht et Forest.

    Cette première station – qui est entrée en fonction à l’automne 2000 – traite les eaux usées de St-Gilles, de Forest, d’Uccle et d’Anderlecht. Mais cela ne suffit pas à redonner à la rivière des eaux claires et poissonneuses…

    A partir des moulins Cérès (ancienne Meunerie bruxelloise), entre le canal de Bruxelles à l’Escaut et l’avenue de Vilvoorde, la Senne s’écoule à ciel ouvert entre les installations industrielles. On peut notamment la découvrir depuis le pont de Buda ou la chaussée de Buda. A ce niveau, la Senne – qui a déjà reçu de nombreux rejets d’eaux usées de l’agglomération bruxelloise – est complètement bétonnée et biologiquement « morte »…

    Entre la Senne et le canal, juste au nord du Pont de Buda, doit s’élever d’ici 2006 la future station d’épuration de Bruxelles Nord, prévue pour traiter les deux tiers restant des eaux usées de la capitale.

    La Coordination Senne réunit toutes les personnes et associations qui souhaitent l’amélioration de la Senne : assainissement des eaux, loisirs, tourisme, paysages et nature dans la vallée de la Senne.

    A.  B.

    Bibliographie

    DES MAREZ G.

    GUIDE ILLUSTRE DE BRUXELLES

    Monuments civils et religieux

    Remis à jour et complété par A. ROUSSEAU

    Touring Club Royal de Belgique, Bruxelles, 1979

     

    QUIEVREUX Louis

    GUIDE DE BRUXELLES

    Editions A. De Boeck, Bruxelles

     

    JACOBS Roel

    BRUXELLES

    L’histoire dans la ville

    Editions Marc Van de Wiele, Bruges, 1994

     

    Abeels G.

    La Senne

    1983

     

     


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  • Essai sur les origines de Bruxelles

    Sommaire

    Bruxelles au temps de la préhistoire

    Bruxelles au temps de l’occupation romaine

    Bruxelles sous l’occupation franque

    Le paysage de Bruxelles avant le 10ème siècle

    Les quatre axes du développement de Bruxelles

    Du site rural au site semi-urbain

    Les origines de Bruxelles

    La création de la ville

    Le castrum

    Sur les traces de la véritable « Première Enceinte » ?

    Le port

    Bruxelles grandit

    Bibliographie

     

    *   *   *

    Bruxelles au temps de la préhistoire

    D'après Victor-Gaston Martiny, « si l'origine du plan de la ville de Bruxelles est à rechercher dans un site privilégié et unique de toute la vallée de la Senne, là où la rivière se démultiplie à proximité du 51ème parallèle, rien dans les occupations antérieures de ce territoire ne fit entrevoir ce choix. Du moins, c'est ce qui ressort de l'apparition, simultanée sans doute, d'une grande variété de stations préhistoriques, dès que l'homme du néolithique moyen (2250 - 1900 avant notre ère) entreprit la colonisation de cette contrée apparemment vouée alors à la chasse et à la pêche.

    La plus grande prudence s'impose cependant quant à la localisation des habitats et à la fixation d'une chronologie antérieure à la fondation du noyau urbain proprement dit. L'érosion, le déplacement des ruisseaux et la modification de leurs débits, l'exploitation du sol, le déboisement ou les remblais ont en effet pu modifier le relief du terrain.

    De plus, les objets qui nous restent de fouilles entreprises pour la plupart au siècle dernier, par des chercheurs qui ne se préoccupaient guère des stratifications archéologiques, ne constituent plus que des sources tronquées. Nous en sommes réduits à nous référer aux seules communications qui furent faites à l'occasion des découvertes et aux interprétations qui en furent données depuis par des spécialistes car, après les fouilleurs, des travaux d'urbanisation ont complètement anéanti la plupart des sites archéologiques connus jusqu'ici ».

    * Aux origines de Bruxelles

    Sur le territoire actuel de Bruxelles-ville, « on découvrit des silex taillés rue des Chartreux, place du Grand-Sablon et dans le Parc ; une hache polie place Sainctelette et rue Philippe-le-Bon ; une pointe de flèche rue du Marteau ainsi qu'une pointe de lance en silex entre le quai aux Barques et le Petit-Château. Toutes ces découvertes furent fortuites. Elles sont d'autant plus précieuses que l'emploi de puissants moyens mécanisés pour le creusement de la tranchée destinée à la jonction ferroviaire Nord-Midi d'abord, des pertuis du métro ensuite, n'a pas permis l'analyse, même superficielle, de quelques millions de mètres cubes de terre déplacée ».

    Bruxelles au temps de l’occupation romaine

    Pour Mina Martens, « le premier souci des Romains fut de renforcer le réseau routier existant en vue de faciliter les communications, gage d'une surveillance et d'une subsistance efficaces. Des voies secondaires ont probablement été reprises de chemins préhistoriques, ce qui expliquerait l'avance aussi rapide des légions de Jules César.

    Les Romains créèrent de nouvelles chaussées rectilignes ignorant les huttes et chaumières préexistantes. C'est ce qui justifie le glissement de l'habitat, des sommets et des fonds marécageux, vers les pentes douces qui les séparent et que l'on déboisa pour y établir des «villas», établissements agricoles rythmant les itinéraires aussi surement que les bornes militaires.

    Si les 19 communes de l'agglomération de Bruxelles restèrent en dehors de la circulation des grandes voies romaines, les vestiges de villas qui y ont été découverts confirment l'existence de « diverticula » dont la «chaussée romaine» à Wemmel, le Dieweg à Uccle, la rue Haute et la chaussée de Haecht à Bruxelles seraient les lointains souvenirs.

    Sur le territoire de Bruxelles-ville, seul un grand bronze d'Antonin le Pieux a été découvert rue de la Grande Île.

    Des traces d'incendie à la villa de Laeken (au lieudit « Stuyvenberg ») confirment sa destruction probable par les Barbares vers l'an 175 et le fait que la région bruxelloise était encore peu sure, même à la fin du 3ème siècle ».

    Bruxelles sous l’occupation franque

    « Il est probable, mais pas certain, que cette insécurité a pu entraîner une désurbanisation. Il manque en tout cas des repères intermédiaires jusqu'au 6ème siècle pour voir la vallée de la Senne à nouveau occupée en toute quiétude ».

    Le paysage de Bruxelles avant le 10ème siècle

    1. Le relief du sol

    Trois formes de relief s'imposent dans le développement de la ville : une très large plaine alluviale au mauvais drainage naturel comblée aujourd'hui par dix à vingt mètres d'alluvions, un versant raide et un plateau.

    Le paysage de la région bruxelloise, à l'aube du 10e siècle, devait être des plus séduisant. C'était une succession de riantes collines qui s'alignaient à l'est et dont les pentes se couvraient de labours et de vignobles égayés de verdoyantes et riches prairies. A l'ouest, dans les basses étendues marécageuses de la rive gauche de la Senne, le sol peu accidenté était couvert de quelques petits bois.

    La Senne traversait une plaine d'alluvions large d'environ un kilomètre qui s'élargissait dans le centre de Bruxelles actuel en formant plusieurs îles.

    L'ondulation du terrain, encore très marquée de nos jours, présente de nombreuses collines isolées ou des éperons de sable comme le Coudenberg et le Treurenberg à Bruxelles-ville, l’altitude 100 à Forest, le Groeselenberg à Uccle...

    Le versant est interrompu par des replats où furent érigées notamment la cathédrale Saint-Michel ainsi que l'église Notre-Dame-du-Sablon et où fut tracée la rue Haute qui bénéficiait ainsi d'une pente minimum.

    Le plateau s'allonge du sud au nord entre les vallées de la Senne et du Maelbeek et se termine en un promontoire dominant le confluent de ces deux rivières au-delà de l'église Sainte-Marie à Schaerbeek.

    2. La rivière

    Avant d'arriver à Bruxelles, la Senne se divisait en deux bras sur la commune d'Anderlecht : le bras principal entrait dans la ville (Pentagone actuel) par la Grande Écluse située le long de l'actuel boulevard Poincaré.

    Le bras secondaire, appelé Senne de Ransfort, pénétrait dans la ville par la Petite Écluse près de la place de Ninove.

    3. La Senne dans la future ville

    Avec René Dons, examinons d'un peu plus près le cours de la Senne et de ses principaux affluents à travers la future ville de Bruxelles.

    Le bras principal de la Senne correspondait grosso modo au tracé des boulevards Lemonnier et Anspach et contournait trois îles dont les deux plus importantes étaient une petite ile triangulaire appelée « Petite Île » ou « Île d'Overmolen », puis une île plus grande ou «Grande Île» qui devint « Île Saint-Géry », enfin, au nord, une nouvelle île triangulaire.

    La Senne de Ransfort coulait en droite ligne jusqu'à l'actuelle place du Jardin aux Fleurs et rejoignait le bras principal de la Senne autour de l’Île Saint-Géry, au carrefour des rues Van Artevelde et Van Praet.

    Le versant raide de la rive droite de la Senne était profondément découpé par des affluents qui devaient littéralement dévaler vers la rivière.

    • Le ROLLEBEEK (Savelbeke, Santbeek ou ruisseau du Sablon), prenait sa source au Petit Sablon, dévalait la pente en traversant le Grand Sablon, suivait les rues actuelles de Rollebeek, des Alexiens, des Bogards et se jetait dans la Senne à hauteur de la place Fontainas.
    • Le SMAELBEEK, issu du RUYSBROECK, suivait la rue actuelle de Ruysbroeck, traversait la place de la Justice, suivait approximativement les rues de l'Hôpital, Duquesnoy, de l'Homme Chrétien, du Marché-aux-Fromages, des Brasseurs, de l'Amigo, des Pierres (Plattesteen) pour rejoindre la Senne non loin de la Bourse actuelle.
    • Le COPERBEEK (ou ruisseau au Cuivre) prenait sa source aux abords de l'ancienne porte du Coudenberg située rue de Namur, à hauteur de la rue Bréderode. Après la traversée du parc du Palais royal, il coulait au fond d'un profond vallon remblayé lors des aménagements de la place des Palais ; passait par la rue des Sols, le quartier actuel de la gare Centrale (ancien quartier Isabelle et Terarken), longeait le Marché-aux-Herbes (où il prenait le nom de SPIEGELBEEK ou ruisseau du Miroir) puis le Marché-aux-Poulets. Il contournait, par l'arrière, l'église Saint-Nicolas où il devenait le SCHOENBEEK ou ruisseau aux souliers car, au Moyen Age, les cordonniers et les savetiers y avaient leurs échoppes. Enfin, il changeait une nouvelle fois de nom et devenait le VUILBEEK ou Sale ruisseau avant de rejoindre la Senne.

    * Aux origines de Bruxelles

    La Senne et ses affluents

    Le site primitif de Bruxelles

    d’après R. Dons

    • Le ruisseau de la HAMEDE quittait le quartier dit « Orsendael », suivait le tracé de la rue des Sables, drainait le quartier dit «Warmoesbroek» le long de la rue du Marais, suivait le tracé de la rue des Boiteux, de la rue d'Argent. Avant de se jeter dans la Senne à hauteur du Centre Monnaie, ce ruisseau alimentait le fossé de la «première» enceinte à l'emplacement actuel de la rue du Fossé-aux-Loups.
    • Un affluent de la Senne a joué plus tard un rôle dans le tracé de la « deuxième » enceinte : il s'agit du RAHLENBEEK qui coulait des hauteurs de l'ancien Observatoire, longeait le boulevard du Jardin Botanique dont les étangs du Jardin Botanique actuel rappellent le souvenir.

    4. Des voies de communication

    Sur la rive droite de la Senne, une voie de communication  - probablement antérieure à l'occupation romaine - s'accrochait au flanc des coteaux et dominait la vallée d'une vingtaine de mètres. Ce chemin agricole suivait à peu près le tracé actuel de la rue Haute, de la Steenpoort, de la rue d'Or, de la rue de l'Empereur, du Cantersteen, du Marché-au-Bois et, par la rue des Paroissiens s'élevait vers la colline de sable (le Molenberg) où s'est érigée la cathédrale Saint-Michel, descendait la Montagne du Sion pour rejoindre l'ancienne route de Schaerbeek, l'ancienne Porte de Cologne (un peu plus bas que la porte de Schaerbeek actuelle) ; elle suivait ensuite la rue de la Poste, la chaussée de Haacht et s'embranchait enfin à la voie romaine qui joignait le Rhin à la Mer du Nord à travers la Belgique.

    A hauteur de l'église Saint-Michel actuelle, une voie féodale ou voie militaire - selon la dénomination de G. Des Marez (1928) - venait rejoindre ce chemin agricole. Cette voie militaire descendait la rue de la Montagne, glissait le long des collines de sable à l'est de la Grand-Place, passait derrière l'Hôtel de Ville et atteignait l’île Saint-Géry par le Pont du Miroir après avoir suivi le tracé de la rue des Pierres actuelle.

    Une voie marchande (ou steenweg) se greffait sur la rue de la Montagne, suivait le Marché-aux-Herbes, le Marché-aux-Poulets, traversait le Pont des Bateaux, poursuivait son tracé par la rue Sainte-Catherine, la rue de Flandre, jusqu'à la chaussée romaine Cologne-Bruges.

    A ces trois premières voies de communication, G. Des Marez ajoute la voie d’accès qui mène au château sur le Coudenberg.

    Les quatre axes de développement de Bruxelles 

    * Aux origines de Bruxelles

    D’après Guillaume Des Marez,

    Bruxelles s’est développée le long de quatre axes majeurs :

    1. la voie agricole
    2. la voie militaire
    3. la voie commerciale
    4. la voie d’accès au château

    A. la Senne

    B. la Senne de Ransfort

    C. la Grande Ile

    D. La Petite Ile

    E. Le Coperbeek

    F. Le Ruysbroeck

    G. Le Rollebeek

    Du site rural au site semi-urbain (695 – 1040)

    Selon Henri Pirenne les villes du moyen âge ont pris forme aux 10ème et 11ème  siècles à l'initiative des commerçants venus s'installer tout près d'un château-fort ou d'un monastère fortifié.

    Cette thèse doit être nuancée. En effet, selon Roel Jacobs, « certaines villes se sont développées autour d'un centre domanial. Des centres de pouvoir religieux ou séculier sans fonction militaire, mais hébergeant une population au pouvoir d'achat important, ont aussi connu un développement urbain. Et, quoi qu'il en soit, le cadre naturel a toujours influencé le choix du lieu d'implantation des villes et leur développement». Pour ce chercheur, « Bruxelles a vu le jour et s'est développée par l'effet combiné de plusieurs causes. Hélas, on ne sait rien de certain sur son histoire la plus ancienne ».

    Selon Mina Martens, « toute trace d'urbanisation où se situeront les 19 communes de l'agglomération bruxelloise se perd entre 700 et le 11ème siècle : pratiquement aucun type d'habitat n'a été révélé, ni lors de fouilles, ni grâce aux textes ».

    «Cependant, au 11ème siècle, l'espace rural présente des configurations paroissiales déjà esquissées. La signification de ce passé demeurera obscure tant que des fouilles, menées avec méthode, n'auront pas mis au jour des restes révélateurs de la présence des hommes et de leurs comportements vis-à-vis de la terre».

    Trois siècles d'histoire de Bruxelles s'insèrent entre deux dates, 695 et 977. Entre ces deux dates il faut déplorer une «absence quasi totale de textes, alors que s'établissent les premières structures fondamentales de l'organisation paroissiale et religieuse, que se mettent en place les facteurs décisifs de l'aménagement territorial féodal et que s'élaborent les bases d'une société livrée à une activité marchande de plus en plus manifeste. Tout au plus sait-on qu'un certain cadre territorial, où figure la région bruxelloise, est déterminé : les limites de l'évêché de Cambrai sont en gros définies depuis le 6e siècle, les frontières politiques du pagus de Brabant sont précisées dès 680-700 mais on ignore le nom des titulaires chargés d'administrer ce pagus, d'y assurer l'exercice de la justice et de nommer aux fonctions subalternes».

    Quant au contexte religieux, il n'est guère plus probant : les évêques de Cambrai sont connus mais leur rôle dans la région bruxelloise reste généralement ignoré.

    Selon les Actes des Évêques de Cambrai (Gesta Episcoporum Cameracensium), l’Évêque VINDICIEN aurait visité la ville en 695 mais cette source est postérieure de trois siècles aux faits qu'elle relate. Par ailleurs, nous dit Roel Jacobs, « il est difficile de déterminer avec exactitude où Bruxelles fut fondée ». 

    Sur la colline ou dans la vallée ? Les spécialistes sont partagés ! Une fois encore, seule l'archéologie pourrait répondre à cette question.

    Les origines de Bruxelles

    Les origines lointaines de Bruxelles sont obscures et souvent déformées par des légendes.

    D'après le Guide Huysmans (« Bruxelles et ses faubourgs »), « la vallée et les collines qui ont donné naissance à la ville de Bruxelles étaient autrefois couvertes de bois et de marais où les Nerviens auraient abrité leurs non-combattants pendant leur campagne contre Jules César ».

    La topographie primitive de la Grand-Place établie par Guillaume Des Marez et des observations géologiques jointes à l'étude des lieux-dits ont permis à ce dernier d'établir que la Grand-Place était à l'origine un marécage. Par ailleurs la toponymie nous apprend aussi que la rue de Tabora s'appelait autrefois rue du Marais !

    * Aux origines de Bruxelles

    A  l'emplacement de la Grand-Place actuelle s'étendait donc un marais appelé « de Moer ». Lorsqu'il fut asséché, un marché s'y installa. C'était le « Nedermerct » ou « Marché d'en bas » qui resta longtemps purement local. Les paysans des domaines voisins l'animaient régulièrement en venant y vendre les produits de leurs exploitations. Ce forum inferum mentionné en 1174 dans une bulle d'Alexandre III se situait à 1 m 20 sous le niveau actuel.

    Cependant, pour Daniel Ch. Luytens, il faudrait oublier cette idée de marais à Bruxelles. Il y avait certes des endroits sablonneux, parfois même des sables mouvants à cause du climat humide, mais il n'y aurait jamais eu de marais ! Le sol était riche en pierres. Celles-ci ont servi à construire des monuments, des steens, les enceintes de la ville...  Sous le quartier de la cathédrale Saint-Michel subsisteraient d'ailleurs des restes de carrières de pierres.

    Une rivière sillonnait la vallée en formant de nombreuses iles et d'innombrables détours. Sa source était éloignée de huit lieues au sud-ouest.

    Selon Daniel Ch. Luytens, à l'époque où les Celtes occupaient le territoire (il y a 3000 ans maximum), Bruxelles se présentait sous la forme de deux falaises d'à peu près 100 mètres de haut (cf. place de l'Altitude Cent à Forest). Au fond de la vallée déambulait une rivière, la BRAINE ou BRANIA dont le nom se retrouve dans les noms des communes de  Braine-l'Alleud, Braine-le-Château...

    De nombreux toponymes utilisés anciennement ou même encore actuellement rappellent le caractère accidenté de la rive droite de la rivière :

    • le Coudenberg où se trouve la place Royale    
    • le Treurenberg où est bâtie la cathédrale Saint-Michel
    • le Galgenberg (colline de la potence) où s'élève le Palais de Justice
    • le Molenberg
    • le Blindenberg
    • rue de la Colline, rue de la Montagne
    • la Montagne de Sion
    • la Montagne des Géants
    • rue Montagne-de-la-Cour
    • rue Montagne-du-Parc
    • rue Montagne de l'Oratoire
    • rue Montagne-aux-Herbes-Potagères

    Sur la rive gauche, mais plus distante du centre de la ville, la colline où se dresse la Basilique de Koekelberg en serait également une trace.

    Depuis quand parle-t-on de Bruxelles pour la première fois ?

    Trois légendes concernent le rôle joué par saint Géry dans la naissance de la ville.

    1. Selon Marcel Vanhamme, la version la plus connue parle de l'installation de l'évêque de Cambrai, saint Géry, vers l'an 600 sur une petite île de la Senne.

    « Le nom de saint Géry apparaît dans la légende des apôtres du christianisme en Belgique, près d'un siècle avant que le nom de Bruxelles soit mentionné dans un document authentique. Saint Géry ou Gaugericus, serait né vers 540 à Carignan, dans les Ardennes françaises, aux environs de Sedan.

    Selon cette première légende, ce personnage, diacre de Trèves, évêque de Cambrai et d'Arras entre 585 et 587, serait mort à Cambrai entre 623 et 636 et non dans l’île que l'on désignera officieusement par son nom («Ile Saint-Géry») ».

    En effet, selon le Guide Huysmans cité par Léon Van Neck, « c'est vers l'an 580 qu'un nommé Géry s'arrêta dans un des ilots de la Senne et y construisit une demeure ou retraite qu'il gratifia du nom de Brugsele (de Brug, marais, et de sele, habitation) ».

     

    2. Selon Léon Van Neck (« Vieux Bruxelles illustré », 1909), «une seconde légende dit que vers l'an 580, Géry, évêque de Cambrai, vint dans notre région dans un but d'évangélisation».

    « Il trouva sur les bords de la Senne une peuplade rude et sauvage, sans religion et sans culte, qu'il résolut de catéchiser ».

    D'après le vicomte Ch. Terlinden, « il est probable que dès l'époque des invasions, les habitants de la vallée de la Senne auraient cherché refuge dans la plus grande île. Des Francs Saliens en s'y fixant également lui donnèrent aussi le nom de BRUOCSELE, l'habitation dans le marais ».

    « Se mettant courageusement à l’œuvre, Géry bâtit une chapelle dans cette grande ile qui devint plus tard l’Île Saint-Géry. En peu de temps il avait converti toute la contrée.

    Encouragé par ces brillants résultats, Géry crut devoir se consacrer entièrement à sa nouvelle région et se fixa donc définitivement dans l’île où il vécut de longues années ».

    Ce groupement créé ou développé par saint Géry mit cependant un siècle pour devenir un hameau. Vers l'an 700 environ, la princesse Gudule, petite-nièce de Pépin de Landen, châtelaine de Hamme près d'Alost, émit le vœu de résider dans l’île afin de continuer l’œuvre d'évangélisation entreprise par saint Géry. La princesse Gudule, femme renommée par sa piété et ses bonnes œuvres, donna un grand essor au hameau qu'elle avait adopté. Plus tard elle fut canonisée et fut honorée comme la patronne de la ville de Bruxelles.

     

    3. Selon De Vogel (« Légendes bruxelloises », 1890) « outre l'édification d'une chapelle, la légende attribue à Saint-Géry le mérite d'avoir miraculeusement débarrassé le territoire bruxellois d'un dragon qui infestait la contrée ».

    * Aux origines de Bruxelles

    « Lorsque saint Géry eut fini de noyer le dragon dans la Senne, il s'en revint vers la colline où il semblerait qu'une petite chapelle se trouvait déjà. C'est là qu'aurait été construite plus tard l'église Saint-Michel ».

    Pour Louis Hymans (« Bruxelles d'autrefois », 1993), « l'origine de Bruxelles se perd dans la nuit des temps. Son nom même a été écrit de vingt façons diverses dont la plus curieuse est Bructersele, orthographe imaginée par un avocat, Me Spinnael, en vue de démontrer que Bruxelles fut la capitale des Bructères »  !

    Une autre hypothèse ferait dériver Bruxelles du nom flamand BROK-SELLES qui signifierait « PONT SUR LA SELLE » (devenue plus tard la Senne) autour duquel quelques premiers habitants seraient venus s'installer malgré les risques d'inondations.

    Historiens et chercheurs, après s'être livrés à des luttes séculaires au sujet de ses origines, après avoir trouvé une racine possible du nom de Bruxelles dans les mots brug, broeyen et broek (et qui donnaient respectivement l'idée d'un pont, d'un nid et d'un marais) ont fini par se mettre d'accord pour affirmer que Bruxelles vient de Broeksele, habitation, manoir, château ou site au bord d'un marais.

    Bruxelles représente, dans toute l'histoire de la genèse des villes entre la mer du Nord, le Rhin et les Ardennes, l'une des énigmes les plus rebelles et les plus irritantes : tant de problèmes surgissent à tout instant de l'enquête que la naissance de Bruxelles reste un mystère des plus profonds.

    Selon le professeur G. Despy, « le schéma des origines de Bruxelles, tel qu'il se présente après un siècle de recherches patientes, minutieuses et ingénieuses, s'articule autour de quelques étapes majeures. Mais le peu de documents nous empêche de connaitre avec certitude le berceau de Bruxelles.

    Si l'on admet l'hypothèse qu'un hameau mérovingien a été à l'origine de Bruxelles, nous en ignorons absolument tout sur le plan archéologique. En effet, avec l'application radicale des préceptes de l'Eglise, à partir de 700 environ, les cimetières cessèrent de nous livrer des éléments de datation et des renseignements archéologiques sur l'habillement et l'armement. Il était en effet interdit de déposer dans les tombes des éléments de mobilier funéraire, les bijoux des femmes ou l'équipement des guerriers défunts ».

    Le centre de Bruxelles a pu être occupé à l'époque carolingienne comme en témoigne un peigne en os de bœuf découvert sous l'actuelle Grand-Place dans une couche tourbeuse sous le niveau du pavement du 11ème – 12ème siècle.

    Pour Henne et Wauters (1845), « c'est à l'emplacement approximatif de l'actuelle cathédrale Saint-Michel que la ville serait née. La bourgade aurait ainsi été à l'abri des inondations qui envahissaient la vallée et dont il est question dans un texte datant de 1125 ».

    Daniel Ch. Luytens expliquerait le nom de Bruxelles à partir du Celte « BRUOC » qui désigne la LANDE, c'est-à-dire un terrain où dominent les bruyères, les genêts et les ajoncs, végétaux qui abondent sur un sol sablonneux. « SELA » viendrait de «CELLA» et désignerait une chapelle.

    En l'an 1000 circulait à Bruxelles une monnaie frappée du nom de la ville BRUOC-SELLA  et de l'évêque S.G.P.E. (Sanctus Gauguericus Epis Copus, c'est-à-dire Saint-Géry, évêque). Quelques exemplaires de cette pièce d'argent ont été fort heureusement conservés.

    Toujours selon ce chercheur, Bruxelles signifierait donc ERMITAGE ou CHAPELLE DANS LA LANDE. Pourquoi ? Selon des origines légendaires, Bruxelles semble avoir toujours été un lieu sacré. Les Celtes y rendaient hommage à 7 dieux. Dans un temple situé sur la colline (à l'emplacement actuel de la cathédrale Saint-Michel) les Gaulois auraient adoré le dieu LUG, protecteur des routes et des voyageurs, dieu des messagers, des coursiers. A l’époque romaine, ce culte au dieu LUG fut remplacé par le culte de MERCURE puis, sous l'influence du christianisme, par la vénération de saint Michel. Cette évolution se vérifie aussi au Mont Saint-Michel en Normandie.

    C'est en 1047 seulement que, selon Mina Martens, l'on apprend de source pratiquement sure que l'église de Bruxelles est consacrée à saint Michel. « Loin d'être un saint local, connu dans la région pour son action pieuse, l'archange Michel vit son culte se propager d'abord d'Orient vers l'Italie. Grâce au pèlerinage du Monte Gargano au 5ème siècle, en Italie, le culte à l'archange atteignit Lyon en 506, Limoges en 550 et Arles entre 574 et 632. La première mention datée en Belgique est celle du prieuré de Roksem en Flandre occidentale en 754. Saint Michel est anciennement honoré dans des domaines mérovingiens ou carolingiens d'origine (Andennes vers 690, Nivelles vers 650, Gerpinnes vers 775) ».

    Selon Daniel Ch. Luytens, Bruxelles serait un des 7 Monts Saint-Michel d'Europe occidentale, un endroit visité par Saint-Michel, censé rendre justice sur la terre.

    Selon le Professeur Paul Bonenfant, «le culte rendu à Michel à Bruxelles est soit le premier indice révélateur de l'existence probable d'un village mérovingien bruxellois établi sur la colline s'élevant au bord de la Senne, soit le résultat de l'influence exercée par les Carolingiens qui l'avaient en honneur particulier».

    «Bruxelles serait-elle partie constituante d'un domaine carolingien ou centre d'une paroisse très ancienne ? En tout cas, l'antériorité du sanctuaire de la colline sur tous les autres lieux cultuels de la région - dont celui de Saint-Géry dans la vallée de la Senne - a été établie par le chanoine Placide Lefèvre, le savant archiviste de la cathédrale Saint-Michel».

    Daniel Ch. Luytens considère Bruxelles comme une ville «récente». Des documents qui se trouvent à l'évêché de Cambrai et datant de 695 évoquent déjà notre ville. Ces documents anciens relatent le passage de l'évêque Vindicien à Brosella pour contrôler comment les prêtres organisaient leur travail. Bruxelles s'avérait en effet être un lieu très chrétien : un pèlerinage s'y organisait en l'honneur de Saint-Michel qui devint beaucoup plus tard patron de la ville.

    En 1934, Paul Bonenfant avançait déjà cette hypothèse : Brosella, localité indiquée par un chroniqueur anonyme du 11ème siècle, semble désigner Bruxelles pour la première fois dans l'histoire.

    Saint Vindicien, fort âgé et mourant, exprima le souhait de se faire transporter de Brosella à l'abbaye du Mont Saint-Eloi où il fut inhumé. Cet événement se situerait vers 695.              

    Le professeur G. Despy reprend également l'hypothèse selon laquelle un domaine rural aurait existé à Bruxelles à l'époque mérovingienne mais sa formulation est différente : « L'évêque de Cambrai Vindicien serait en effet passé à Bruxelles en 695 et aurait doté le domaine d'une église paroissiale qui fut consacrée à Saint Michel à l'époque carolingienne. L'habitat rural de ce village aurait été groupé autour de cet oratoire et le long d'un ancien diverticulum romain parallèle au cours de la Senne sur la rive droite » (la rue Haute actuelle).

    A partir du milieu du 10ème siècle, ce village serait sorti progressivement de l'ombre, amorçant lentement une sorte de mutation pré-urbaine.

    Dès 965 un atelier monétaire y aurait fonctionné régulièrement et les deniers qu'on y frappa furent retrouvés jusqu'en Suède et en Poméranie puisque les deniers passaient de marchand en marchand.

    Cependant, il est difficile de concevoir la frappe de deniers en milieu rural à l'époque ottonienne car il s'agit tout de même de l'exercice d'un droit régalien qui peut certes s'opérer par délégation de pouvoir de la part du souverain mais il faut se demander quelle autorité publique a bien pu procéder à un tel monnayage dans une localité rurale comme devait l'être Bruxelles au milieu du 10ème siècle.

    La seule certitude est l'existence d'un atelier comtal à Bruxelles qui émit des deniers de BRVOCSELLA dans les premières décennies du 10ème siècle et qui est cité dans les sources écrites dès 1073.

    En 966, l'abbaye de Nivelles y aurait possédé une propriété foncière qualifiée de stadium, terme dont certains chercheurs ont voulu faire un marché.

    A. Van Loey (1937) reconnait Bruxelles dans le nom « Bruocsella » désignant une localité indiquée dans un diplôme de 966 de l'empereur Otton 1er le Grand.

    Cet acte parle d'une donation du prêtre Regennaldus à l'abbaye de Nivelles qui possède dans le pays des biens considérables tels que vignobles, pêcheries et salines.

    Très précieux pour l'étude des origines de la ville, ce texte parle également de l'ecclesiam matriciam qui désignerait l'église Saint-Michel.

    Selon l'avis de Henri Pirenne, le mot « stadium » qui figure dans cet acte pourrait être traduit par «marché» car les marchands nivellois, particulièrement actifs, avaient l'habitude de passer par Bruxelles en se rendant à Londres.

    Mais ce mot « stadium » pourrait tout simplement désigner une propriété foncière de l'abbaye de Nivelles, antérieur au « forum » et que G. Des Marez (1935) a situé à l'emplacement de la Bourse actuelle, c'est-à-dire dans la ville basse, sur la rive droite de la Senne.

    Ce dernier détail apporterait un indice d'une parcellisation du sol, liée à une croissance démographique, ainsi qu'une preuve de l'intérêt que commençaient à éprouver des abbayes à acquérir des biens immeubles en milieu urbain.

    En 977 enfin, Bruxelles serait échue au duc de Basse-Lotharingie CHARLES, qui serait entré en possession de ce domaine royal des souverains germaniques soit par héritage familial, soit comme bénéfice de fonction. Et celui qui gouvernait au nom de l'Empereur un vaste duché qui s'étendait de l'Escaut jusqu'au Rhin, aurait fait ériger, entre 977 et 991, un château dans les îles de la Senne ainsi qu'une chapelle dédiée à saint Géry et dans laquelle il fit transporter les reliques de sainte Gudule venues de l'ancienne abbaye de Moorsel.

    * Aux origines de Bruxelles

    Mais qu'en est-il de la création de la ville ?

    La création de la ville

    Au 10ème siècle, en 966 exactement, Othon Ier, Empereur du Saint Empire, fit construire une chapelle à l'emplacement actuel (ou très proche ?) de la cathédrale Saint-Michel. Une légende raconte que c'est à cet endroit que l'archange Michel aurait terrassé le dragon, symbole de Satan, du mal.

    En 966, le hameau de Bruxelles faisait partie du duché de Basse Lotharingie, inclus dans le Saint Empire Romain Germanique. En 977, CHARLES, neveu de l'empereur Othon Ier, devint Duc de Basse Lotharingie et c'est au cours de cette même année que Charles édifia un « castrum » dans l’Île Saint-Géry et en fit sa résidence habituelle. Selon le Professeur Paul Bonenfant, le lieu n'aurait pas été un camp retranché avant la présence du Duc Charles.

    Peut-être cette construction défensive a-t-elle été élevée à l'initiative de l'Empereur qui, de cette manière, protégeait la frontière ouest de ses terres contre les invasions du Marquis de Flandre. Le site géographique était en tout cas propice à la défense.

    Les redoutables marécages (ou tout simplement quelques sables mouvants ?) qui s'étendaient le long de la vallée de la Senne, de même que les quelques bras de la rivière, valaient l'imposante accumulation de pierres et les épais donjons du castrum de Gand ou du castrum de Bruges.

    Le castrum de l'Ile Saint-Géry était complexe : il rappelait les oppida des Gaulois et des Germains. Il ne faut pas se le figurer pareil aux châteaux forts des barons féodaux. C'était non seulement un poste militaire mais aussi un centre administratif. Il comprenait par conséquent des bâtiments aux destinations diverses.

    En l'an 979, le Duc CHARLES fut proclamé Roi de France. C'est pourquoi les Bruxellois l'ont appelé CHARLES de FRANCE. Avec l'accord de l'évêque de Cambrai, CHARLES de FRANCE choisit Bruxelles pour capitale, site magique où l'on invoquait saint Michel.

    Le rite de la fondation de Bruxelles eut lieu le 11 août, jour de la mort de saint Géry.

    Le 12 août 979, Charles fit revenir de Cambrai les reliques de saint Géry.

    C'est cette année qui a été choisie pour fêter, en 1979, le millénaire de Bruxelles !

    Pendant quelques années, Bruxelles aura donc été la capitale de la France. De nombreux points de similitude assez troublants existent entre les deux capitales actuelles :

    • Paris et Bruxelles sont deux villes conçues sur une île fortifiée ;
    • Charles a débaptisé la BRAINE pour l'appeler la SENNE imitant le nom de la SEINE qui arrose Paris ;
    • Charles de France a conçu chez nous, exactement à même distance du centre de la ville, une abbaye et une église Saint-Denis (à Forest) ;
    • Charles de France a créé le rite de sainte  Gudule, le pendant du rite de sainte Geneviève à Paris...

    Voilà donc l'existence de Bruxelles établie. Mais il faut bien avouer que presque tout ce que l'on a pu avancer sur l'histoire de Bruxelles avant 1050, repose soit sur des légendes, soit sur des textes tardifs, soit sur des hypothèses souvent fragiles. D'après Roel Jacobs, le texte le plus ancien qui mentionne le château de Bruxelles ne date que du douzième siècle : c'est la «Vie de Saint-Guidon».

    Pour G. Despy, « Est-il bien prudent d'envisager que Brosella ait existé comme village ou comme paroisse à la fin du 7ème siècle au plus tard ? Ce serait faire un crédit bien aveugle à une source écrite bien tardive (350 ans plus tard, à une époque où Bruxelles commençait à s'affirmer comme une agglomération urbaine naissante).  S'il fallait retenir ce témoignage à tout prix, pourquoi faudrait-il voir en ce Brosella de 695 le centre d'un vaste domaine rural déjà muni, de surcroît, d'une église paroissiale alors que ce pouvait fort bien être un simple hameau dans l'un des grands domaines ruraux de la vallée de la Senne ? »

    Pour ce même auteur, «il parait aussi imprudent de faire de l'église Saint-Michel de Bruxelles le centre paroissial d'une villa carolingienne, d'autant qu'il faut se rappeler que la première charte qui mentionne cette église à Bruxelles ne date que de 1073» !

    Une première alternative doit donc être posée à propos de saint Michel : église paroissiale carolingienne d'un domaine rural existant depuis les temps mérovingiens ou bien chapitre canonial construit par l'autorité princière au milieu du 11e siècle dans une agglomération urbaine naissante.

    Selon le choix que l'on fera entre ces deux interprétations (et seule l'archéologie permettrait peut-être un jour de trancher entre elles), la genèse de la ville pourra être présentée de deux manières différentes :

    • village rural né sur les hauteurs de la rive droite de la Senne et descendant progressivement vers l'ouest jusqu'à atteindre les bords de la rivière ;
    • agglomération née sur les bords de la Senne avec extension territoriale vers l'est et construction d'un chapitre de chanoines vers 1050.

    « Les origines de Bruxelles constituent toujours aujourd'hui un mystère profond », conclut G. Despy. « Le seul espoir de voir un jour se lever un certain nombre d'hypothèques qui pèsent lourdement sur l'histoire de la genèse de la ville se trouve du côté de l'archéologie. Mais, sous ce rapport, la situation de Bruxelles est véritablement catastrophique : peu d'informations sérieuses sur les églises et les bâtiments civils datant d'avant 1200 ; pas de sondages dans le sous-sol qui révèlent quoi que ce soit aussi bien pour la chronologie du château ducal que pour l'habitat. Alors que le territoire de Bruxelles a été labouré à plusieurs reprises depuis le siècle dernier à la suite de grands travaux d'infrastructure, l'archéologie urbaine reste singulièrement muette pour tout le Haut Moyen Age ».

    Le castrum

    Selon G. Despy, des enquêtes magistrales, fondées essentiellement sur la toponymie ancienne, ont permis d'établir que tout un complexe castral avait été construit dans les îles de la Senne à une époque fort ancienne. Il se trouvait là, incontestablement, un castrum mais aussi une exploitation domaniale ainsi qu'une église consacrée à saint Géry.

    L'endroit qui devait défendre nos régions contre une invasion éventuelle venant de l'ouest, de Flandre, était admirablement choisi pour ses aptitudes défensives : situé dans une île, protégé par des bras de la rivière, par des terres bourbeuses du fond de la vallée, par des prairies probablement marécageuses sur la rive occidentale et, par surcroît, dans la zone des inondations périodiques de la Senne.

    Le castrum comprenait la Grande Île, défendue selon toute vraisemblance par une solide levée de terre servant aussi de digue, par une portion d'un vieux parc et garantie par un premier rempart percé d'une porte, la Porte du Lion (N.B. Ce premier rempart sera récupéré à cet endroit pour être incorporé à l'enceinte du 11ème siècle).

    Dans le castrum, on trouvait :

    • l'habitation du duc ;

    Daniel Ch. Luytens situe cette forteresse ducale non pas à l'emplacement actuel de l'église des Riches-Claires comme l'ont prétendu certains historiens, mais dans le pâté de maisons compris entre la rue Van Praet, la rue Auguste Orts et la rue Van Aertevelde, c'est-à-dire tout près du Pont de la Carpe.

    • la chapelle Saint-Géry où étaient précieusement conservées les reliques de sainte Gudule ;
    • des habitations pour les gens de la suite du duc, pour ses serviteurs et ses hommes d'armes ;
    • des hangars dans lesquels étaient entreposés les produits apportés des domaines environnants ;
    • un logement pour les hôtes de passage ;
    • le moulin banal du duc.

    L'accès au castrum était rendu possible par trois ponts. Le plus important, le Pont du Miroir ou Spiegelbrug, enjambait l'actuel boulevard Anspach à hauteur de la rue des Pierres et de la rue du Borgval.

    Le pont en direction de la chaussée de Flandre s'appelait Pont Hollant, Pont de la Carpe ou encore Haut-Pont ; c'était en fait le Pont des Juifs ou Jodenbrugge.

    Un deuxième Pont des Juifs ou Werversbrugge ou Pont des Teinturiers menait à la rive droite de la Senne.

    Sans doute, dit Marcel Vanhamme, les Juifs se sont-ils groupés entre ces deux ponts et ont formé ainsi le premier ghetto de Bruxelles.

    * Aux origines de Bruxelles

    Le castrum et le castellum

     

    * Aux origines de Bruxelles

     L’Ile Saint-Géry par rapport au quartier actuel

    Sur les traces de la véritable « Première Enceinte » ?

    Probablement construite à la même époque, c'est-à-dire aux environs de 977, une tête de pont formant une défense supplémentaire - un castellum - fut établi sur la rive droite de la Senne.

    Originellement constitué par des remblais de terre ou des palissades de bois, ce premier rempart a sans aucun doute été rapidement empierré. Des vestiges de cette première muraille défensive existent encore de nos jours mais on en parle peu ou pas ! 

    Pour Paul Bonenfant, les remparts établis sur la rive droite de la Senne remontent à l'époque du château construit dans le dernier quart du 10ème siècle, en face, sur la plus grande île qu'entourait la rivière.

    Selon Daniel Ch. Luytens, il subsiste un magnifique pan de mur dans la cave de la Maison Dandoy à proximité de la Grand-Place mais son propriétaire refuse de le montrer et va même jusqu'à en nier l'existence ! En procédant à des travaux de pavement rue au Beurre, on a découvert des restes de cette enceinte primitive. Il existe encore des traces de cette même muraille dans les caves de la bijouterie située au coin de la Petite rue au Beurre.

    Selon Roel Jacobs, « deux textes du 18ème siècle donnent à penser que jadis des remparts s'élevaient à cet endroit ».

    En 1694, les graissiers demandent l'autorisation de rénover un immeuble de location situé derrière « La Brouette » - leur local sur la Grand-Place - et derrière lequel se trouve un bâtiment bas qu'ils désirent agrandir et surélever «jusque sur l'ancien mur de la ville». Ils demandent la permission de « construire sur ledit mur ou rempart de la ville sans que cela entraine des frais pour la ville ».

    Un autre texte, datant de 1752, renvoie à l'époque où « la ville princière de Bruxelles était encore tellement petite que ses portes et ses remparts se situaient à l'entrée de la rue au Beurre, proche de la Grand-Place ».

    En 1972, des restes d'un « guichet » (porte de moindre importance, inaccessible au grand trafic) – la  Porte du Lion – ont été découverts rue de la Grande Île actuelle (anciennement rue des Sœurs Noires) mais les promoteurs de la construction de nouveaux bâtiments se sont empressés de faire tout recouvrir ! Ce Guichet du Lion appartenant donc au castellum fut incorporé à l’enceinte du 13ème siècle.

    L'installation de ce premier système défensif devait être décisive pour la naissance et pour le développement de notre ville. C'est, en effet, à l'abri de l'ile fortifiée, et à cause de son existence, que la ville de Bruxelles a pu naître et se développer.

    * Aux origines de Bruxelles

     A cet endroit se trouvait jadis le Guichet du Lion

    1. Essai sur les origines de Bruxelles

    Restes probables des substructions du Guichet du Lion démoli en 1594,

    découverts en 1972 rue de la Grande Ile

    Le port

    A la pointe septentrionale de la petite ile située au nord du castrum, se trouvaient le port de Bruxelles et un pont permettant le chargement des barques. Le Pont des Bateaux (pons navium ou scipbrug) ou Pont des Poissonniers marquait le terme de la navigation sur la Senne. Ce pont à deux arches servait au transbordement des produits agricoles.

    Henri Pirenne a démontré que la formation des villes au Moyen Age était essentiellement due à l’œuvre des marchands qui pratiquaient le commerce en des endroits favorables.

    Ainsi, si ce sont des préoccupations militaires qui ont fait choisir l'emplacement de l'Île Saint-Géry pour l'édification du castrum, la naissance de la cité est due également à la profondeur des eaux de la Senne.

    La profondeur de la rivière était plus importante en aval de l’île qu'en amont où des ensablements causés par l'existence de plusieurs bras se produisaient régulièrement.

    C'est donc sur la pointe nord de l’Île Saint-Géry que fut aménagé le premier port de Bruxelles.

    En contact avec le Rupel, l'Escaut, le Rhin inférieur, en rapport avec Londres et Cologne, les bateliers qui naviguaient sur la rivière trouvaient au pied du castrum une défense bien organisée.

    Bruxelles est très vite apparue comme un portus, c'est-à-dire un endroit où les marchandises devaient être débarquées puisque la Senne cessait d'être navigable.

    Bruxelles grandit

    Bientôt l’Île Saint-Géry devint trop petite pour contenir l'accroissement rapide de sa population. Les habitations s'établirent d'abord sur les bords de la Senne puis elles s'étendirent en diverses rues vers les collines, sur la rive droite.

    Comme la plupart des villes qui surgirent en ces temps reculés, notre ville devait être un amas confus de chétives masures très primitives : ce n'étaient que de modestes abris faits de lattes et de pieux couverts d'argile et de chaume, bordant des ruelles étroites, sans pavé, ressemblant en hiver à de vrais cloaques.

    La bourgade se développa rapidement et, vers l'an 1000, elle était devenue suffisamment importante pour que Lambert II Baldéric décida de la faire entourer d'une ceinture de remparts. Nos manuels d'histoire désignent donc peut-être à tort cette nouvelle enceinte comme étant la «première enceinte de Bruxelles». Elle suscite nombre d'énigmes. Les archéologues situent la fin de son édification aux environs de l'an 1100.

    A.  B.

    BIBLIOGRAPHIE

    Marcel Vanhamme

    LES ORIGINES DE BRUXELLES

    Bruxelles, Office de Publicité s.a. Editeurs, 1951

     

    Léon Van Neck

    VIEUX BRUXELLES ILLUSTRE

    Bruxelles, Oscar Lamberty Editeur, 1909

     

    Louis Hymans

    BRUXELLES D'AUTREFOIS

    PML Editions, 1993

     

    A. Van Loey

    BIJDRAGE TOT DE KENNIS VAN HET ZUIDWESTBRABANTSCH

    In de 13de en 14de eeuw fonologie

    Tongeren, 1937

     

    P. Bonenfant

    Quelques cadres territoriaux de l'histoire de Bruxelles

    Annales de la Société d'Archéologie de Bruxelles

    XXXVIII  1934

     

    Alexandre Henne et Alphonse Wauters

    HISTOIRE DE BRUXELLES

    en 3 tomes

    Bruxelles, 1843

     

    Alexandre Henne et Alphonse Wauters

    HISTOIRE DE LA VILLE DE BRUXELLES

    en 4 volumes

    Bruxelles, Edition Culture et Civilisation, 1968

     

    Sous la direction de Mina Martens

    HISTOIRE DE BRUXELLES

    Toulouse, Editions Privat, 1976

     

    Guillaume Des Marez

    LE DEVELOPPEMENT TERRITORIAL DE BRUXELLES AU MOYEN AGE

    Bruxelles, Falk, 1935

     

    H. Pirenne

    LES VILLES ET LES INSTITUTIONS URBAINES

    Bruxelles, N.S.E., 1939

     

    René Dons

    HISTOIRE DE BRUXELLES

    Bruxelles, A. De Boeck, 1947

     

    Sous la direction de Jean Stengers

    BRUXELLES, CROISSANCE D'UNE CAPITALE

    Anvers, Fonds Mercator, 1979

     

    Roel Jacobs

    BRUXELLES, l'histoire dans la ville

    Bruges, Editions Marc Vande Wiele, 1994

     

    Vicomte Charles Terlinden

    BRUXELLES, PLACE FORTE

    1934

     

    Louis Verniers

    UN MILLENAIRE D'HISTOIRE DE BRUXELLES

    Bruxelles, Editions De Boeck, 1965

     

    M. Vanhamme

    BRUXELLES, DE BOURG RURAL A CITE MONDIALE

    Anvers-Bruxelles, Editions Mercurius, 1978

     

    A. Hegenscheidt

    LE SITE DE L'AGGLOMERATION ET DE LA BANLIEUE BRUXELLOISE

    Bulletin de la Société royale belge de géographie, 53, 1929 - Pages 80-81

     

    W.B. Craan et Ph. Vandermaelen

    PLAN GEOMETRIQUE DE LA VILLE DE BRUXELLES

    Bruxelles 1835

     

    Yves Cabuy et Stéphane Demeter

    ATLAS DU SOUS-SOL ARCHEOLOGIQUE

    DE LA REGION DE BRUXELLES

    10.1  Bruxelles Pentagone

    Potentiel archéologique

    Bruxelles, Editions Gutenberg, 1995

     


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  • * Essai sur les origines de Bruxelles :    lien URL

    * L'enceinte de Bruxelles datant du 13ème siècle : lien URL

    * Visite de la Grand-Place de Bruxelles : lien URL

    * Visite de la cathédrale St Michel : lien URL

    * La vallée de la Senne : lien URL


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